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Articles

“Luca” d’Enrico Casarosa

Film américain d’Enrico Casarosa (2021), avec (voix) Aloïs Le Labourier Tiêu, Matt Mouredon, Juliette Davis… 1h36. Mise en ligne sur Disney+ le 18 juin 2021. Deux jeunes animaux marins en goguette incognito sur la terre ferme décident de se fondre dans la foule pour profiter des plaisirs de l’été en compagnie des humains qu’ils rencontrent et qui n’ont aucun moyen de les identifier comme des créatures venues d’ailleurs. La scène se déroule à Portorosso, un petit port pittoresque de la Riviera italienne où tout semble avoir été conçu pour le bonheur. L’intrigue du dernier-né des studios Pixar n’est qu’un prétexte. L’important réside davantage dans le parti qu’en tire le réalisateur Enrico Casarosa en sublimant ce cadre enchanteur. Luca ressemble à un dépliant touristique qui exalte ce que l’Italie a de meilleur avec une richesse graphique qui laisse pantois. Il y a dans ce film quelques morceaux d’anthologie qui renvoient au quotidien le plus prosaïque qui soit. Rarement un film d’anim

“Les 2 Alfred” de Bruno Podalydès

Film français de Bruno Podalydès (2020), avec Denis Podalydès, Sandrine Kiberlain, Bruno Podalydès, Yann Frisch, Luàna Bajrami , Michel Vuillermoz, Isabelle Candelier, Samuel Benchetrit… 1h32. Sortie le 16 juin 2021. Denis Podalydès, Sandrine Kiberlain et Bruno Podalydès Il y a déjà près de trente ans que Bruno Podalydès nous répète sans relâche qu’il s’est sans doute trompé d’époque. Il le démontre une nouvelle fois en orchestrant le télescopage de deux mondes antagonistes : celui dans lequel évolue Alexandre, chômeur à qui son épouse autoritaire a accordé deux mois pour démontrer qu’il peut devenir un père responsable, et celui d’Arcimboldo, une sorte de professeur Tournesol de la nouvelle économie. Lorsque Alexandre décroche une promesse d’embauche dans une start-up trop accueillante pour être tout à fait honnête, il lui faut toutefois dissimuler son statut de papa poule à sa patronne qui ne croit qu’en la technologie, mais a banni les enfants de son plan de carrière. Les deux frère

“Cinquième set” de Quentin Reynaud

Film français de Quentin Reynaud (2020), avec Alex Lutz, Ana Girardot, Kristin Scott Thomas, Jürgen Briand, Tariq Bettahar, Quentin Reynaud, Damien Gouy… 1h53. Sortie le 16 juin 2021. Alex Lutz Certaines disciplines sportives sont plus cinématographiques que d’autres. Du tennis, on se rappelle quelques réussites aussi mémorables que L’inconnu du Nord-Express (1951) d’Alfred Hitchcock, Les vacances de monsieur Hulot (1953) de Jacques Tati ou Match Point (2005) de Woody Allen. Cinquième set s’attache à un homme de l’ombre, un soutier des courts qui est naguère passé tout près d’un destin de champion avant de retomber dans l’oubli et de servir de sparring-partner à des joueurs dont il a contribué à élever la qualité de jeu. Jusqu’au moment où se représente une occasion inespérée qui ressemble à une seconde chance. Là, notre homme va tout mettre en œuvre pour aller jusqu’au bout de son rêve… Parce que son adversaire le plus redoutable n’est autre que lui-même. Cinquième set propose un

“La nuée” de Just Philippot

Film français de Just Philippot (2020), avec Suliane Brahim, Sofiane Khammes, Marie Narbonne, Raphaël Romand, Vincent Deniard, Victor Bonnel… 1h41. Sortie le 16 juin 2021. Suliane Brahim , Raphaël Romand et  Marie Narbonne Devenue veuve, une agricultrice se lance dans l’élevage de sauterelles pour sauver son exploitation en péril. Jusqu’au moment où cette mère qui élève seule une adolescente et un petit garçon se laisse dépasser par cette activité à plein temps qui l’entraîne dans une spirale vertigineuse. La farine qu’elle fabrique à l’aide de ses insectes s’avère si peu rentable qu’elle la contraint à une escalade frénétique de sa production dont les serres géantes se multiplient autour de son habitation comme des pustules sur le visage d’un malade de la varicelle. Une course au profit obsessionnelle qui la fait sombrer peu à peu dans un repli sur soi suicidaire, à la lisière de la folie pure… Suliane Brahim Si le festival de Cannes 2020 avait pu se dérouler comme prévu, La nuée aur

“Les racines du monde” de Byambasuren Davaa

Die Adern der Welt Film mongolo-allemand de Byambasuren Davaa (2019), avec Bat-Ireedui Batmunkh, Enerel Tumen, Yalalt Namsrai, Algirchamin Baatarsuren, Ariunbyamba Sukhee… 1h36. Sortie le 16 juin 2021. Depuis quelques années déjà, les Occidentaux, à commencer par les Allemands, ont compris le profit qu’ils pouvaient tirer de ces ex-républiques soviétiques d’Asie centrale où se perpétuent des traditions ancestrales menacées par la course au profit. C’est ainsi qu’ont vu le jour des films comme Ulzhan (2007) de Volker Schlöndorff, mais aussi L’histoire du chameau qui pleure (2003) cosigné avec le chef opérateur italien Luigi Falorni et signé à l’Oscar du meilleur documentaire, puis Le chien jaune de Mongolie (2005) et Les deux chevaux de Gengis Khan (2009) à travers lesquels la réalisatrice mongole d’adoption allemande Byambasuren Davaa a réussi à s’imposer en mettant au point un savant compromis de fiction et de documentaire, toujours en prenant soin de s’adresser au public le plu

“Il n’y aura plus de nuit” d’Éléonore Weber

Documentaire français d’Éléonore Weber (2020) Avec la voix de Nathalie Richard. 1h15. Sortie le 16 juin 2021. La guerre est devenue un vaste jeu de rôles par écrans interposés auquel la technologie moderne octroie des armes de destruction massive dont personne ne pouvait soupçonner la léthalité. L’usage des caméras infrarouges permet aujourd’hui aux tireurs de repérer leurs cibles sans être repérés. Comme son titre le souligne, Il n’y aura plus de nuit s’attache à la disparition d’une contingence naturelle que l’homme est parvenu à surmonter pour mieux tuer. On connaissait déjà ces drones manipulés par des champions de jeux vidéo depuis des hangars anonymes qu’Andrew Niccol a mis en scène dans Good Kill (2014). Le documentaire d’Éléonore Weber franchit un nouveau cap en montrant que la barbarie des hommes n’a plus de limites lorsqu’on la pare du don d’ubiquité. Ces artifices qui habillent d’images abstraites les actions les plus concrètes présentent l’avantage de soulager la conscien

“Sound of Metal” de Darius Marder

Film américano-belge de Darius Marder (2019), avec Riz Ahmed, Olivia Cooke, Lauren Ridloff, Mathieu Amalric, Paul Raci, Domenico Toledo, Chelsea Lee… 2h. Sortie le 16 juin 2021. Riz Ahmed L’histoire d’amour du septième art avec le son dure depuis près d’un siècle. Elle n’a pas pour autant toujours été paisible. À la fin des années 20, certains esprits chagrins prophétisaient même le plus sérieusement du monde que la TSF aurait la peau du cinéma. Force est de constater que le son demeure aujourd’hui encore un parent pauvre de ce syncrétisme. Un paradoxe d’autant plus insoutenable que le confort acoustique des spectateurs n’a cessé d’être amélioré pour sauvegarder la suprématie des salles, alors même que ses ressources dramatiques n’ont été que très peu exploitées, sinon dans des œuvres aussi différentes que Playtime (1967) de Jacques Tati, Conversation secrète (1974) de Francis Ford Coppola, Stalker (1979) d’Andreï Tarkovski, Blow Out (1981) de Brian de Palma ou très récemment Le ch

“L’un des nôtres” de Thomas Bezucha

Let Him Go Film américain de Thomas Bezucha (2020), avec Kevin Costner, Diane Lane, Lesley Manville, Kayli Carter, Booboo Stewart, Jeffrey Donovan, Will Brittain… 1h55. Sortie le 16 juin 2021. Diane Lane et  Kevin Costner Kevin Costner est l’un des derniers acteurs taillés pour jouer dans des westerns. Sans doute parce qu’il possède tous les atouts du héros solitaire tel que l’immortalisèrent Gary Cooper ou James Stewart, davantage que le trop inoxydable John Wayne. Ce n’est sans doute pas un hasard si le réalisateur de Danse avec les loups (1991) et Open Range (2003) y a remporté ses succès personnels les plus éclatants en tant qu’interprète. Il suffit qu’il apparaisse à l’écran pour qu’on se trouve transporté dans un autre monde. L’un des nôtres est un western d’aujourd’hui dans un cadre immuable. Un film habité par des personnages sur lesquels le temps ne semble exercer aucune prise. À la suite de la mort de leur fils, deux fermiers du Montana décident d’aller récupérer leur pet

“Crock of Gold” de Julien Temple

Crock of Gold : A Few Rounds with Shane MacGowan Documentaire musical britannique de Julien Temple (2020), avec Shane MacGowan, Johnny Depp, Siobhan MacGowan, Victoria Mary Clarke, Gerry Adams… 2h04. Sortie le 16 juin 2021. Shane MacGowan Inlassable témoin de son temps, Julien Temple a édifié en quelques décennies une véritable anthologie de la musique contemporaine qui l’a vu passer du statut de stakhanoviste du clip dans les années 80 et 90 à des formats plus longs et même quelques incursions inégales dans la fiction. Au sein de cette œuvre foisonnante, il a toujours voué une affection particulière aux empêcheurs de chanter en rond, à commencer par les Sex Pistols dont il a été un compagnon de route à ses débuts. Crock of Gold célèbre un autre franc-tireur en la personne de Shane Patrick Lysaght MacGowan, le leader irlandais des Pogues aujourd’hui rongé par un abus explosif de substances délétères. Un handicap qui n’a jamais empêché le gaillard de défendre ses convictions à travers

“Nomadland” de Chloé Zhao

Film américain de Chloé Zhao (2020), avec Frances McDormand, David Strathairn, Gay DeForest, Linda May… 1h48. Sortie le 9 juin 2021. Frances McDormand Traditionnellement, à Hollywood, les grands studios vendent du rêve sans vraiment chercher à s’attarder sur le versant obscur d’une société américaine opulente. Il fut pourtant un temps pas si reculé où la misère avait sa place dans les line-ups des Majors, ainsi que l’attestent par exemple certaines comédies grinçantes de Frank Capra et ces films générés par la Grande Dépression comme Les raisins de la colère (1940) inspiré à John Ford par le classique de John Steinbeck. Désormais, c’est au cinéma indépendant que revient le soin de traiter des oubliés et des sans-grade de l’Amérique, comme en ont attesté récemment des films aussi réussis que 99 Homes (2014) de Ramin Bahrani ou The Florida Project (2017) de Sean Baker. C’est sur ce terrain que s’est aventurée la réalisatrice américaine d'origine chinoise Chloé Zhao en portant à l’