Film français de Quentin Reynaud (2020), avec Alex Lutz, Ana Girardot, Kristin Scott Thomas, Jürgen Briand, Tariq Bettahar, Quentin Reynaud, Damien Gouy… 1h53. Sortie le 16 juin 2021.
Certaines disciplines sportives sont plus cinématographiques que d’autres. Du tennis, on se rappelle quelques réussites aussi mémorables que L’inconnu du Nord-Express (1951) d’Alfred Hitchcock, Les vacances de monsieur Hulot (1953) de Jacques Tati ou Match Point (2005) de Woody Allen. Cinquième set s’attache à un homme de l’ombre, un soutier des courts qui est naguère passé tout près d’un destin de champion avant de retomber dans l’oubli et de servir de sparring-partner à des joueurs dont il a contribué à élever la qualité de jeu. Jusqu’au moment où se représente une occasion inespérée qui ressemble à une seconde chance. Là, notre homme va tout mettre en œuvre pour aller jusqu’au bout de son rêve… Parce que son adversaire le plus redoutable n’est autre que lui-même. Cinquième set propose une réflexion passionnante sur le culte de l’effort, mais aussi sur le sacrifice que représente une jeunesse consacrée à aller au bout de soi-même sans autre but que de rendre ses adversaires plus performants et plus combatifs. Le cinéma a naturellement tendance à célébrer les champions. Le premier film de Quentin Reynaud, qui a lui-même consacré une partie de son existence à renvoyer la balle aux plus grands, s’attache à ces obscurs, ces sans-grades qui ne brilleront jamais dans la lumière, mais dont le rôle est essentiel.
Ana Girardot
Le personnage de ce film est indissociable de son interprète, décidément en train de se forger une réputation enviable d’acteur de composition, spécialité trustée à l’écran par l’école britannique et quelques individualités hors du commun. Après le chanteur vieillissant de Guy, Alex Lutz s’impose une nouvelle fois dans un personnage qui lui ressemble d’autant moins qu’il a abordé ce rôle sans la moindre expertise du tennis. Jamais pourtant on ne doute de son expertise dans ce sport. Ce personnage, il existe aussi à travers le regard lucide de deux femmes : sa compagne campée par Ana Girardot et sa mère qu’incarne Kristin Scott Thomas. La mise en scène de Quentin Reynaud se concentre sur ses protagonistes. Quant aux plus beaux échanges du film, ce n’est ni sur quick ni sur terre battue qu’ils se déroulent, mais dans l’intimité de ce type au mental inoxydable qui va tout mettre en œuvre pour gagner le match le plus important de sa vie : celui qu’il va livrer contre ses vieux démons pour enrayer la fatalité afin de pouvoir vieillir avec dignité et sans remords. Nul besoin d’apprécier le tennis ni même le sport pour goûter la finesse psychologique de ce film pétillant de malice.
Jean-Philippe Guerand
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