Film français de Nathan Ambrosioni (2025), avec Camille Cottin, Monia Chokri, Juliette Armanet, Manoâ Varvat, Nina Birman, Guillaume Gouix, Féodor Atkine, Frankie Wallach, Myriem Akheddiou, Tania Dessources, Camille Lethuillier, Maxime, Tsibangu… 1h51. Sortie le 3 décembre 2025.
Nina Birman et Manoâ Varvat
Une mère en crise dépose ses deux enfants chez sa sœur aînée avec laquelle elle avait coupé tous les ponts, avant de disparaître comme elle avait surgie… Point de départ d’un film d’une infinie délicatesse qui marque les retrouvailles du réalisateur de Toni, en famille, aujourd’hui âgé de seulement 26 ans, avec Camille Cottin à qui il offre un nouveau rôle de mère, mais cette fois par procuration, qu’elle essaie de concilier avec une homosexualité épanouie et une vie de couple équilibrée, en assumant le rôle auquel elle était sans doute la moins préparée. Il émane de cette chronique intime une émotion irrésistible qui a séduit le jury du festival d’Angoulême où elle a décroché la récompense suprême, le Valois de diamant, ainsi que de multiples prix du public dans d’autres manifestations. Un signe qui ne trompe pas et qui prélude bien souvent à un succès de bouche-à-oreille, comme ce fut notamment le cas il y a quelques mois d’À bicyclette. Comme Mathias Mlekuz, Nathan Ambrosioni s’adresse autant au cœur qu’à la raison et s’appuie à cet effet sur des sentiments forts et universels qui n’ont absolument rien de fabriqué. Il installe une situation, soigne ses personnages et laisse infuser en les observant au plus près. En l’occurrence, sa jeunesse lui permet de donner un considérable supplément d’âme aux enfants, tandis que sa précocité lui sert à adopter un regard d’adulte d’une grande justesse, en organisant le choc de ces deux mondes a priori incompatibles, sans avoir pour autant besoin de les entraîner sur le terrain glissant de la tragédie ou du mélodrame. Aux cris, il préfère les chuchotements et plus encore les silences.
Camille Cottin et Monia Chokri
Au-delà de l’histoire poignante d’abandon qu’il raconte, le cinéaste questionne une fois de plus la notion de parentalité en alternant le regard des enfants et celui des adultes (qui plus est féminines) dans un va-et-vient subtil et incessant qui évite tous les pièges de son sujet. Il relâche judicieusement la pression lorsque la tentation du mélodrame se rapproche et conserve toujours la juste distance vis-à-vis de ses protagonistes. La maturité de Nathan Ambrosioni s’exprime par l’habileté avec laquelle il parsème son récit d’ellipses et s’honore de considérer le spectateur assez averti pour ne pas avoir à le prendre par la main et le laisser remplir lui-même les points de suspension dont il saupoudre son scénario. Comme le souligne son titre, Les enfants vont bien est un film qui positive à partir d’une situation propice au tragique, sans chercher constamment à tout expliquer. Parce qu’ainsi va la vie… Après tout, les personnes disparues se comptent par centaines chaque année et certaines s’évanouissent à jamais. C’est parce qu’il se refuse à tout expliquer que Les enfants vont bien réussit à toucher droit au cœur, en évitant tous les pièges du sentimentalisme, mais sans jamais contourner les difficultés inhérentes à son sujet. À l’image de son titre de prime abord anodin qui recèle derrière son libellé de carte postale faussement rassurant la profondeur parfois vertigineuse des relations humaines. Autrement dit, les adultes sont quant à eux un peu moins sereins.
Jean-Philippe Guerand




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