Film américano-chilo-italo-allemand de Pablo Larraín (2024), avec Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino, Alba Rohrwacher, Haluk Bilginer, Kodi Smit-McPhee, Stephen Ashfield, Valeria Golino, Caspar Phillipson, Vincent Macaigne, Lydia Koniordou, Aggelina Papadopoulou, Erophilie Panagiotarea, Philipp Droste… 2h03. Sortie le 5 février 2025.
Angelina Jolie
Le destin de la cantatrice Maria Callas est de ceux qui stimulent les cinéastes à la fois par sa personnalité romanesque, sa voix unique et les célébrités qui ont traversé sa trop brève existence (53 ans). Après s’être attelé aux biopics de Lady Di dans Spencer (2021), où il filmait déjà un scénario du Britannique Stephen Knight, et de la veuve de JFK dans Jackie (2017), le réalisateur chilien Pablo Larraín adopte en quelque sorte le point de vue opposé en s’attachant aux derniers jours de l’autre grand amour du milliardaire Aristote Onassis. Une divine diva au corps décharné et au visage émacié qui trouve en Angelina Jolie une interprète d’autant plus poignante qu’elle a elle-même subi plusieurs opérations chirurgicales qui l’ont éprouvée dans sa chair et qu’elle a passé sept mois à prendre des cours de chant pour s’identifier à son personnage. La comédienne projette en outre dans ce rôle son vécu le plus intime et vibre aux derniers moments de son personnage avec un mélange de résignation et de bravoure qui lui appartiennent dans un Paris vintage reconstitué partiellement à Budapest dont l’aspect factice ne trompera sans doute pas grand-monde, malgré la splendeur de la photo d’Ed Lachman. C’est d’autant plus regrettable que ce portrait de l'icône suffisamment académique pour ne pas contrarier ses adorateurs cerne assez justement la diva, à en juger par une référence en la matière, Maria by Callas (2017) de Tom Volf, mais aussi les autres documentaires qu’il lui a consacrés.
À son habitude, Pablo Larraín sort des sentiers battus de la reconstitution pour fantasmer l’idole en l’identifiant à ses rôles les plus marquants. Comme si cette femme au seuil de la mort se réincarnait une dernière fois à travers ses personnages et des enregistrements dont elle sait qu’ils constituent les seules traces tangibles de son existence terrestres et resteront un miracle unique aux oreilles de l’éternité. De la diva recluse dans la solitude, le film dresse un portrait vraiment touchant d’où émergent les figures de sa garde rapprochée, qu’il s’agisse des domestiques zélés campés par les comédiens italiens Pierfrancesco Favino et Alba Rohrwacher ou du médecin parisien incarné par Vincent Macaigne. Dès lors, qu’importe que cet hommage admiratif et parfois inégal ose déroger à la doxa, il s’impose comme une performance authentique autour d’une icône qui continue à faire rêver par son destin se confond parfois avec la tragédie des personnages du répertoire qui ont jalonné sa carrière, de “Lucia di Lammermoor” à “La Traviata” en passant par “Médée” dans lequel l’a immortalisée Pier Paolo Pasolini à l’écran. Reste qu’une figure aussi atypique se serait sans doute accommodée de davantage d’audace que ce biopic sans doute trop sage qui laissera probablement les aficionados de la diva sur leur faim.
Jean-Philippe Guerand
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