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“Treize vies” de Ron Howard



Thirteen Lives Film anglo-américano-thaïlandais de Ron Howard (2022), avec Viggo Mortensen, Colin Farrell, Joel Edgerton, Paul Gleeson, Tom Bateman, Nophand Boonyai, Girati Sugiyama, Teeradon Supapunpinyo… 2h27. Mise en ligne sur Amazon Prime Video le 5 août 2022.



Viggo Mortensen et Colin Farrell



Surprise par un déluge inattendu dû à la mousson, une équipe junior thaïlandaise de football et son entraîneur se retrouvent coincés à quatre kilomètres de l'entrée d’une grotte coupée du monde à la suite d'une montée des eaux aussi soudaine que brutale. Tandis que les secours se mettent en branle pour les extraire de ce dédale inextricable sillonné de galeries souterraines et de boyaux submergés, une véritable armada de sauveteurs se constitue à l’extérieur. Plus de dix mille volontaires joignent leurs efforts parmi lesquels des plongeurs venus de l’étranger pour apporter leur contribution à cette chaîne de solidarité exemplaire. C’est cette tragédie authentique survenue lors de l'été 2018 dans la province de Chiang Rai, à la frontière de la Birmanie et du Laos, qu’a portée à l’écran William Nicholson, le scénariste chevronné de Gladiator (2000), et que met en scène avec son efficacité coutumière Ron Howard dont c’est le deuxième opus consécutif réalisé pour une plateforme après Une ode américaine qu’avait diffusé Netflix en 2020. Sur un registre très différent, Treize vies bénéficie de son sens du spectacle éprouvé et réussit à aller bien au-delà du fait divers authentique dont il s’inspire, en nous donnant à voir ce qu’aucun reportage d’actualité n’a pu nous montrer en son temps, ne serait-ce qu’en raison de l’isolement de ces adolescents et de leur coach. Avec en prime un message positif sur un élan exceptionnel de fraternité internationale.



Colin Farrell, Joel Edgerton et Viggo Mortensen



Cinéaste à l’ancienne nourri par les plus grands maîtres du cinéma spectacle et rompu à ses moindres secrets, Ron Howard met sa virtuosité naturelle au service d’une histoire authentique qui s'avère propice à l'intégration des codes hollywoodiens les plus éprouvés. Il transcende cette épopée souterraine par l’élan de solidarité universel qu’elle déclenche, en s’attachant plus particulièrement à un groupe de plongeurs occidentaux qui possèdent pour eux l’expertise et l’expérience qui font défaut aux forces d’intervention locales. À son habitude, le réalisateur exploite les moindres ressources de son sujet et met en scène méthodiquement ce sauvetage souterrain en insistant sur son caractère profondément humain et la capacité de ses protagonistes à se transcender pour une bonne cause, en évacuant les rescapés un à un dans des conditions hors du commun. C’est dans l’équilibre qu'il réussit à établir entre des séquences spectaculaires et des intermèdes intimistes qu’excelle le réalisateur de Backdraft (1991) qui connaît ses classiques et témoigne de ce sens inné du spectacle qui caractérise Hollywood depuis les origines et qu’il a lui-même souvent mis au service de justes causes. Treize vies est un film catastrophe qui virevolte allègrement sur les conventions du genre, avec la complicité d’un quintette de comédiens de renom, en liberté sur le registre de la composition la plus élémentaire, sans qu'aucun d'entre eux n'essaie jamais de voler la vedette à ses partenaires. C'est en soi déjà un exploit à saluer.

Jean-Philippe Guerand







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