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"Just Kids" de Christophe Blanc

Film franco-suisse de Christophe Blanc (2019), avec Kacey Mottet Klein, Andrea Maggiulli, Anamaria Vartolomei 1h43. Sortie le 5 août 2020.




Christophe Blanc fait partie de ces cinéastes français qui n’ont jamais dévié de leur ligne, n’ont jamais connu de succès notoire, mais gardent le cap coûte que coûte. Ce sont là les caractéristiques d’un auteur au sens le plus noble du terme. Just Kids est son quatrième film pour le cinéma en vingt-cinq ans après Faute de soleil (1995), Une femme d’extérieur (2000) et Blanc comme neige (2010). Entre-temps, il a signé deux téléfilms et coréalisé deux courts métrages. Fidèle à son attrait pour les personnages un peu “hors-sol”, il s’attache ici à l’étrange relation entre deux frères et une sœur devenus brutalement orphelins et contraints de se serrer les coudes pour affronter le monde des adultes. La réussite du film, le plus abouti de son auteur à ce jour, repose sur son casting et le parti que tire le metteur en scène de trois interprètes qu’on peut qualifier de véritables natures. À commencer par Kacey Mottet Klein dont les choix reflètent l’exigence : ses compositions remarquées chez Ursula Meier, André Téchiné, Christine Carrière ou Guillaume Senez l’attestent.




Et que dire de la comédienne roumaine Anamaria Vartolomei, toujours aussi étonnante de My Little Princess (2011) d’Eva Ionesco à La bonne épouse (2020) de Martin Provost ? L’outsider de cette distribution est cependant le benjamin de la fratrie : Andrea Maggiulli, débutant d’une spontanéité hors du commun qui démontre des qualités étonnantes sans jamais céder à la tentation du cabotinage. Ici intervient le talent de directeur d’acteurs de Christophe Blanc qui réussit à faire exister cette famille tuyau de poêle et à nous donner à partager sa rage de vivre dans un monde trop corseté par les normes du confort bourgeois. Just Kids est une réussite qui donne envie de voir son réalisateur accéder la cadence, tant sa petite musique sonne juste. Dans la compassion, mais jamais dans l’apitoiement ni dans la complaisance.
Jean-Philippe Guerand



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