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“Yoroï” de David Tomaszewski



Film français de David Tomaszewski (2025), avec Orelsan, Clara Choï, Corinne Puget, Jérémy Margallé, Hiromi Komorita, Alice Yanagida, Kazuya Tanabe, Skread, Ablaye, Yôko Narahashi… 1h46. Sortie le 29 octobre 2025.



Clara Choï et Orelsan



On connaît la fascination d’Aurélien Contentin alias Orelsan (littéralement “Monsieur” Orel) pour l’Asie et sa culture. Il la place aujourd’hui au cœur de son deuxième film dans lequel le chanteur dans son propre rôle part s’installer au Pays du Soleil levant avec sa compagne enceinte de ses œuvres. Au lieu de la quiétude espérée pour attendre l’heureux événement, la demeure traditionnelle campagnarde dans laquelle ils ont élu domicile leur réserve une surprise surgie du fond des âges ou plutôt d’un puits situé dans la cave de la maison où le chanteur se retrouve affublé malgré lui d’une armure (yoroï) utilisée par les samouraïs à la période médiévale qui provoque aussitôt le réveil d’une horde de créatures pertubatrices, les Yokaïs. Un combat impitoyable s’engage où la sérénité espérée par la future mère est ponctuée par les ennemis incessants qu’affronte son compagnon pas vraiment prédisposé à cette épreuve. Comme on le voit, Orelsan et son compère réalisateur David Tomaszewski (qui avait déjà signé le clip de “L’odeur de l’essence”) ont considérablement élevé le niveau de leurs ambitions par rapport au premier film du rappeur signé avec David Offenstein, Comment c’est loin (2015). Dix ans plus tard, Yoroï reflète la fascination du chanteur pour la culture japonaise qu’il avait déjà assouvie partiellement en participant à la post-synchronisation de l’anime One Punch Man et du film Mutafukaz. Il va aujourd’hui au bout de son rêve en s’en donnant les moyens. Résultat un film spectaculaire qui a tout pour combler ses fans, même s’il ne s’agit pas vraiment de la “ comédie familiale d’aventures fantastiques ” qu’il avait annoncée, la noirceur étant assumée.



Clara Choï et Orelsan



Dans ce film dont il a décrit la phase d’écriture comme une thérapie, Orelsan incarne un personnage très proche de lui : un chanteur à succès surmené qui s’exile et s’isole avec son épouse (la franco-chinoise Clara Choï dans son premier rôle en vedette) pour partager sa grossesse loin du bruit et de la fureur qui rythment sa vie. Une quiétude perturbée par l’irruption d’une menace imprévue qui le contraint à se transformer lui-même en samouraï pour repousser les assaillants doués de pouvoirs redoutables. Il s’offre là un film tel qu’il les aime en tant que spectateur et Yoroï n’a jamais à rougir de cette admiration. L’ambition est au rendez-vous et les effets spéciaux qui permettent au jeune couple de faire face à des créatures aussi étranges que redoutables s’avèrent très réussis. On sent que ce film d’aventure fantastique est avant tout l’aboutissement d’un rêve de gosse qui le partage avec générosité. Le pouvoir de l’illusion fonctionne et on en vient à ne plus s’étonner de rien, face à ces ectoplasmes qui jaillissent de partout et revêtent les apparences les plus saugrenues. Non content de réaliser un fantasme, Orelsan en tient le rôle principal et se montre là aussi à la hauteur en samouraï malgré lui qui voit l’événement considérable que constitue sa future paternité perturbé par l’obligation de prendre les armes afin d’assumer son rôle de protecteur auprès de sa compagne et de son enfant à naître. À tous les sens du terme, ce film s’impose comme le moment de vérité d’un chanteur qui ose se frotter au cinéma qu’il apprécie en tant que spectateur. Gageons que ses fans le suivront et même qu’il en séduira de nouveaux. Total respect !

Jean-Philippe Guerand





Orelsan

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