Film français de Valentine Cadic (2025), avec Blandine Madec, India Hair, Arcadi Radeff, Matthias Jacquin, Lou Deleuze, Béryl Gastaldello, Pierre Cévaër, Lorette Nyssen, Aurélia Petit, Ahmed Fetta, Antoine Gourlier, Flore Babled, Estelle Meyer, Josué Ndofusu, Nabil Drissi, Tristan Zerbib, Helio Pu, Louise Ribière, Hélène Bares, Amine Lajiri… 1h17. Sortie le 11 juin 2025.
Blandine Madec (au centre)
Certains films arrivent encore à nous émerveiller par leur fraîcheur et leur simplicité. Le rendez-vous de l’été raconte l’histoire simple d’une jeune Normande qui débarque à Paris pour assister aux épreuves de natation des Jeux Olympiques de Paris. Une joie qui tourne au vinaigre quand elle constate que l’hébergement prévu est aux abonnés absents. Elle doit dès lors demander l’hospitalité à sa demi-sœur perdue de vue depuis une dizaine d’années. Quitte à se retrouver confrontée à des souvenirs encore douloureux. Le premier long métrage de Valentine Cadic, écrit avec la complicité de Mariette Désert, revient en quelque sorte aux fondamentaux du cinéma : une histoire solide, des interprètes inspirés et une mise en scène intégralement concentrée sur les uns et les autres qui capte quelque chose de cette parenthèse enchantée que le scénario intègre toujours à propos, alors même qu’elle est venue contredire les prophètes de malheur qui prédisaient le chaos intégral. Cet impératif immaîtrisable, la réalisatrice et sa coscénariste Mariette Désert, connue pour ses collaborations avec Katell Quillévéré et Mikhaël Hers, sont parvenues à l’intégrer en procédant en amont à une vaste enquête auprès de participants des olympiades précédentes qui leur ont fourni des pistes. Ce principe particulier qui consiste à laisser le réel envahir la fiction, la cinéaste l’avait en outre expérimenté dans son court métrage Les grandes vacances (2022) déjà interprété par l’étonnante Blandine Madec qu’elles avaient réussi à tourner en pleine saison estivale dans un camping peuplé de touristes. Elle en fait ici un atout maître qui nourrit bon nombre de scènes d’atmosphère.
La réalisatrice associe pour l’occasion deux comédiennes très différentes : India Haïr qui ne cesse de nous ravir par la singularité de ses choix, de Mouret aux Dardenne, et Blandine Madec, résolument à contre-courant sur un registre naïf et spontané qui émeut par son naturel et sa spontanéité que Valentine Cadic avait déjà exploités dans son court métrage Les grandes vacances (2023) où elle incarnait déjà ce personnage de Blandine Bolbec dont le nom résonne en écho au sien par sa sonorité pittoresque. Elle-même comédienne, la réalisatrice a trouvé là une interprète fétiche qui ne lui ressemble pas vraiment mais lui permet de décrire un personnage féminin pour le moins atypique : une trentenaire dépourvue d’attaches qui avance dans la vie avec une détermination parfois à la lisière d’une certaine naïveté et un décalage assumé vis-à-vis du monde moderne et de son cynisme endémique. On pourrait la définir comme une fille nature qui n’a pas perdu sa capacité à s’émerveiller, à l’instar de l’admiration de connaisseuse qu’elle voue à la nageuse Béryl Gastaldello. C’est d’ailleurs l’un des charmes de ce Rendez-vous de l’été de s’inscrire solidement dans le réel pour accentuer la crédibilité de la fiction. À l’instar des relations qui lient cette fille plus secrète qu’il n’y paraît avec cette demi-sœur qu’elle semble au fond connaître assez peu mais dont la situation représente à la fois l’exact opposé de la sienne et une sorte d’idéal illusoire qui cache en fait une certaine détresse affective. Le film aborde enfin avec beaucoup de justesse le fossé qui continue à opposer les deux France affectionnées des sociologues et ce pays caché qu’on ne voit plus guère au cinéma à travers ses décalages. Il émane de cette chronique d’une simplicité apparente une vérité souvent troublante.
Jean-Philippe Guerand
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