Film américain de Michael Pearce (2024), avec Julianne Moore, Sydney Sweeney, Domhnall Gleason, Kyle MacLachlan, Fiona Shaw, Edmund Donovan, Rebecca Creskoff, Albert Jones, Will Fitz, Audrey Grace Marshall, Merritt Janson, Jared Canfield, Lucia VanDette, Bryan Burton, Kisha Barr, Katya Campbell, Aven Campau… 1h23. Mise en ligne sur Apple TV+ le 13 juin 2025.
Julianne Moore et Sydney Sweeney
Une femme assaillie par les dettes entretient tant bien que mal, mais toute seule, le club d’équitation qu’elle dirigeait avec son épouse dont elle n’a toujours pas digéré la disparition. Jusqu’au moment où débarque la fille qu’elle a eue de son premier mariage, en quête de secours face à une situation critique due aux errements de son petit ami dealer auquel elle s’accroche en dépit du bon sens. Dès lors, c’est la situation de la mère qui va devenir un véritable enfer, à trop vouloir venir en aide à sa fille pour la sauver de ses mauvaises fréquentations et d’elle-même… Echo Valley reflète le tournant pris par Julianne Moore depuis quelques années. Plutôt que d’attendre du cinéma des grands rôles rendus hypothétiques par la loi du marché, elle tourne désormais assidûment pour Apple TV+, que ce soit une série comme “Histoire de Lisey” ou le film Sharper dont l’inspiration est d’autant plus fertile que leur rentabilité est préservée par le principe même de leur mode de production. Cette plateforme de streaming est en outre la plus inventive du marché, peut-être aussi parce qu’elle ne propose qu’un catalogue limité, mais toujours de qualité où une nouveauté n’en chasse jamais une autre. Imaginé par Brad Ingelsby, le créateur de la mini-série à succès “Mare of Easttown”, Echo Valley offre en l’occurrence à Julianne Moore un personnage de mère courage qui n’a sans doute plus sa place dans le cinéma américain de l’ère post-Covid où le public ne semble se déplacer qu’au prorata des effets spéciaux qui lui sont proposés en Imax ou en 4DX.
Domhnall Gleason
Le film de Michael Pearce, révélé par Jersey Affair (2017), navigue à vue entre deux genres nobles du cinéma de l’âge d’or : le film noir et le mélodrame. Son héroïne est une femme d’aujourd’hui qui assume sa bisexualité sans que ça semble poser le moindre problème à quiconque dans une Amérique rurale où le trumpisme n’a visiblement pas encore semé le germe de la discorde en montant les uns contre les autres. Peut-être parce qu’elle est protégée par son intégration discrète dans ce havre campagnard où elle doit assurer seule toutes les tâches dévolues naguère à des employés qu’elle n’a plus les moyens de payer. Dès lors, à ses ennuis personnels vient s’ajouter la situation de sa fille et de son compagnon junkie aux prises avec le racket d’un petit caïd. Face à une situation qui ne cesse de s’envenimer, la mère va bien au-delà des multiples rôles qui lui sont assignés, se mêle de tout, y compris de ce qui ne la regarde pas, et s’expose à de multiples dangers en s’exposant à des risques démesurés. L’accumulation de rebondissements et de personnages secondaires finit par brouiller la cohésion de cette histoire qui a toutefois le mérite de faire fi du manichéisme en montrant peu à peu la fille perdue campée par Sidney Sweeney comme exempte de circonstances atténuantes et en rachetant partiellement la petite frappe incarnée par Domhnall Gleason. Reste l’interprétation comme d’habitude impériale de Julianne Moore dans cet emploi périlleux où seule contre tous dans une course éperdue pour garder la tête hors de l’eau, elle réussit la prouesse de s’accrocher à sa dignité en manifestant l’efficacité d’un couteau suisse.
Jean-Philippe Guerand
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