Film franco-belge de Cédric Klapisch (2025), avec Suzanne Lindon, Abraham Wapler, Vincent Macaigne, Julia Piaton, Zinedine Soualem, Paul Kircher, Vassili Schneider, Sara Giraudeau, Cécile de France, François Berléand, Olivier Gourmet… 2h04. Sortie le 22 mai 2025.
Vincent Macaigne, Zinedine Soualem
Abraham Wapler et Julia Piaton
Sollicités par un notaire à la demande d’un entrepreneur immobilier désireux d’acquérir un terrain, quatre cousins chargés de représenter leur famille pléthorique se rendent dans une maison abandonnée par leurs ancêtres dont ils sont les héritiers. Sur place, ils vont découvrir les bribes d’un passé oublié à travers des vestiges qui évoquent le destin de leur lointaine aïeule débarquée à Paris en 1895 en compagnie de deux jeunes gens ambitieux. Treize décennies plus tard, ses descendants vont découvrir le destin extraordinaire de cette inconnue dans un contexte artistique foisonnant où tout était encore possible. Avec La venue de l’avenir, Cédric Klapisch signe son film le plus ambitieux depuis Peut-être (1999) qu’il avait déjà écrit avec Santiago Amigorena. Il y confronte deux époques avec une fantaisie assumée sur le mode de la fresque chorale et jongle avec tous les codes du cinéma sans jamais bouder son plaisir. Il choisit pour cela une jeune provinciale naïve qui va se retrouver malgré elle à l’intersection de deux arts majeurs, au moment même où Paris devient au sens propre une ville lumière grâce à la fée électricité que symbolise cette fameuse “avenue de l’avenir” qui lui inspire une sorte de jeu de mots comme il les affectionne. Le film joue d’ailleurs du choc de ces époques qu’il télescope et dont il va même jusqu’à orchestrer la rencontre au cours d’une séance de spiritisme irrésistible qui tourne au dîner de têtes. Un pur plaisir qui fourmille de clins d’œil malicieux où le cinéaste rend le spectateur complice de ses facéties savoureuses et s’offre quelques plaisirs d’esthète pour initiés. Quitte à laisser certains de ses protagonistes s’inviter malgré eux dans la chronique de leur époque sans en mesurer les conséquences.
La venue de l’avenir nous entraîne à cette période charnière rarement décrite à l’écran où deux arts majeurs émergent simultanément : la photographie et le mouvement impressionnistes. Parce qu’elle est partie à la conquête de paris en compagnie de deux garçons ambitieux, la jeune Normande à laquelle s’attache Klapisch devient malgré elle un témoin de premier plan de cette double révolution qui va rapprocher ses lointains descendants. À son habitude, le réalisateur pense d’abord au cinéma et entraîne le spectateur dans une folle farandole qui flirte avec la science-fiction et culmine lors d’un trip mémorable. Il réunit pour cela un casting plutôt brillant où sa garde rapprochée (représentée par son interprète fétiche Zinedine Soualem et une Cécile de France irrésistible avec son accent belge) se mêlent à de nouveaux venus promis à l’intégrer parmi lesquels Vincent Macaigne, Julia Piaton, Paul Kircher, Vassili Schneider, Sara Giraudeau, le prometteur Abraham Wapler, la chanteuse Pomme et naturellement Suzanne Lindon dont le physique intemporel cadre avec l’idée qu’on peut se faire d’une provinciale innocente confrontée au progrès et à des sentiments qu’elle découvre. Un prétexte qui inspire à Klapisch une scène d’anthologie où nos contemporains ébahis se trouvent téléportés parmi le vernissage du fameux “Salon des refusés” où se presse l’intelligentsia artistique de l’époque. Le film s’avère exactement à l’image de cette séquence : ludique et attachant. Avec toujours cette passion du cinéma qui obsède son réalisateur depuis toujours et lui a souvent valu une reconnaissance du public que les grands festivals et les distributions des prix n’ont que trop rarement entérinée. Comme si le seul fait de plaire était déjà suspect en soi.
Jean-Philippe Guerand
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