Film français de Maël Piriou (2025), avec Julia Piaton, Grégory Gadebois, Quentin Dolmaire… 1h24. Sortie le 30 avril 2025.
Grégory Gadebois
Il est des idées qui ne se perdent pas et ne se transforment que modérément. C’est le cas de l’argument du premier long métrage de Maël Piriou qui a déjà servi à déjà plusieurs reprises dans des contextes assez différents. Tout est parti du film belge Hasta la Vista (2011), lui-même inspiré pour une bonne part du combat mené par l’avocat britannique Asta Philpot pour faire reconnaître officiellement le droit à la sexualité des handicapés. Distribuée sur un coup de cœur par Claude Lelouch, cette comédie de mœurs a engendré une déclinaison néerlandaise, Adios Amigos (2016), et pas moins de deux remakes américains : Mission paradis (2019) pour le cinéma et Why Do You Love Me (2023) pour la télévision. Un engouement qui s’explique par au moins deux raisons : c’est un “Feel Good Road Movie” qui porte un regard à la fois singulier, bienveillant et audacieux sur le handicap en le confrontant à une thématique délicate : la vie sexuelle et une libido difficile à satisfaire. Cette virée superbe qui met le cap sur une maison close a pour protagonistes trois individus victimes de problèmes de motricité et désireux de satisfaire leur libido en faisant appel à des services d’aide à la personne d’un type un peu particulier qui rappellent ces temps pas si reculés où les garçons de bonne famille se faisaient dépuceler par des prostituées rémunérées par leurs parents en guise d’éducation sexuelle. Le mécanisme est éprouvé pour avoir déjà beaucoup servi et cette version en affine certaines composantes, grâce à un casting particulièrement efficace qui mêle trois comédiens venus a priori d’univers assez différents et se concentre à dessein sur ce noyau dur. Le succès populaire rencontré par des films comme Le huitième jour (1996), Intouchables (2011) et Un p’tit truc en plus (2024) a démontré que le handicap abordé avec délicatesse peut engendrer des succès populaires mémorables.
Une avocate atteinte d’une maladie incurable embarque son meilleur ami, handicapé lui aussi, et recrute l’un de ses clients comme chauffeur pour rallier une maison close en Espagne afin que le corps exulte. Évidemment, rien ne se passe tout à fait comme prévu… On a beau connaître la chanson, elle produit toujours son effet. D’autant plus que le nombre des protagonistes se réduit ici à un trio et que, comme l’affirme la sagesse populaire, la destination apparaît assez vite moins importante que l’itinéraire qui permet de l’atteindre. Et c’est là où intervient de façon déterminante le casting qui repose sur un trio pour le moins inattendu : Julia Piaton, omniprésente sur les écrans ces temps-ci, parfois dans des rôles secondaires, du Secret de Khéops au Mélange des genres, en passant par Les règles de l’art et bientôt La venue de l’avenir, Grégory Gadebois dans son emploi familier d’ours mal léché avec un cœur gros comme ça et Quentin Dolmaire, éternel rêveur et ludion atypique révélé par Arnaud Desplechin dans Trois souvenirs de ma jeunesse. Une association de bienfaiteurs qui produit des étincelles et réussit la prouesse de renouveler l’argument originel développé par Geoffrey Enthoven. Le film réussit la prouesse de passer du rire aux larmes, parfois à l’intérieur d’une même scène, et surtout d’éviter le pathos et la solennité grâce à des comédiens valides qui interprètent ces rôles de pure composition avec une constante retenue et un tact exemplaire. Il s’agit en fait moins d’un remake au sens propre du terme que d’une variation autour d’un même thème.
Jean-Philippe Guerand
Commentaires
Enregistrer un commentaire