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“Un médecin pour la paix” de Tal Barda



I Shall Not Hate Documentaire canado-français de Tal Barda (2024), avec Izzeldin Abuelaish… 1h32. Sortie le 23 avril 2025.



Izzeldin Abuelaish



Notre monde est à ce point sans pitié que certains êtres semblent venir d’un univers parallèle par leur capacité à encaisser les coups les plus rudes et à conserver leur foi indéfectible en une humanité qui ne mérite plus vraiment ce nom. Né dans un camp de réfugiés, le professeur Izzeldin Abuelaish est l’un de ces personnages hors du commun. Ne serait-ce que parce qu’il a été le premier médecin-accoucheur palestinien à travailler dans un hôpital israélien. Il a par ailleurs vécu une véritable tragédie en 2009 quand un char de Tsahal a visé à bout portant sa maison en tuant trois de ses filles et une nièce. Malgré sa détresse, il a préféré mettre à profit cette expérience douloureuse et parier sur la réconciliation que sur la haine et est parti s’installer au Canada en se dépensant sans compter pour que les deux peuplent reprennent le dialogue. Au point de se voir nommé à cinq reprises pour le Prix Nobel de la Paix et de publier un livre devenu un best-seller et aujourd’hui un biopic documentaire qui se prolonge au-delà du pogrom perpétré par le Hamas le 7 octobre 2023 et du massacre sans fin des habitants de Gaza qui s’est ensuivi. Avec cette impression irrésistible que la spirale de la violence ne peut être enrayée que par des hommes de bonne volonté comme ce père célibataire qui a choisi d’élever ses cinq enfants survivants sur une terre étrangère, tout en luttant en justice pour que la responsabilité du gouvernement israélien soit reconnue.



Izzeldin Abuelaish et deux de ses filles



Un médecin pour la paix est un témoignage poignant sur la résilience d’un homme né dans un camp de réfugiés qui a toujours refusé de baisser les bras et se cramponne à sa foi en l’humanité malgré les signes désespérants dont est pavé son itinéraire personnel. Son parcours personnel ressemble à un calvaire qu’il persiste à considérer comme une épreuve de vérité et dont il met à profit les enseignements personnels en partageant son expérience comme une leçon de vie édifiante pour la société toute entière. Dès lors, le film que lui consacre la réalisatrice franco-américaine Tal Barda est un véritable éloge de la sagesse et une incroyable invitation au pardon qui nous donne une leçon de vie assez peu banale. Le professeur Abuelaish est un homme de paix dans un monde en guerre, dans la lignée du Mahatma Gandhi, de Martin Luther King et du Dalaï Lama. Un être à part qui a voué son existence à des valeurs en voie de disparition et consacre sa vie et combattre des moulins à vent bien plus redoutables que ceux qu’affrontait Don Quichotte, puisqu’ils ont pour noms barbarie, cynisme et dialogue de sourds. Et même s’il doit parfois se sentir seul contre tous, sa foi est de celles qui ébranlent les montagnes. Alors regarder et surtout écouter cet homme d’exception, c’est entrer en relation avec l’humanité, dans le sens le plus noble que peut revêtir ce mot si souvent détourné de sa signification originelle.

Jean-Philippe Guerand







Izzeldin Abuelaish

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