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“The Alto Knights” de Barry Levinson



Film américain de Barry Levinson (2025), avec Robert de Niro, Debra Messing, Cosmo Jarvis, Kathrine Narducci, Belmont Cameli, Bob Glouberman, James Ciccone, Mike Seely, Joseph Moreland, Michael Adler, Gary Chinn, Bethany Ashton Wolf… 2h03. Sortie le 19 mars 2025.



Robert de Niro



Toute sa vie durant, Robert de Niro aura incarné des mafieux magnifiques. C’est même sans doute le fil rouge de sa carrière exceptionnelle. Son vieux complice Barry Levinson lui propose toutefois un nouveau défi à sa démesure puisqu’il en incarne deux et non des moindres, Vito Genovese et Frank Costello que le cinéaste avait déjà mis en scène dans Bugsy (1991). Des vieilles connaissances puisque ce dernier a fait partie des personnages réels qui ont inspiré Vito Corleone au romancier Mario Puzo, qu’incarnait d’ailleurs jeune de Niro dans Le Parrain, 2e partie de Francis Ford Coppola, il y a tout juste un demi-siècle, et dont il a interprété une variation imaginaire et apocryphe dans la comédie Mafia blues (1999) d’Harold Ramis. C’est dire combien l’acteur évolue ici en terrain connu. Son autre visage avait quant à lui celui de Lino Ventura dans Cosa Nostra (1972) de Terence Young. C’est dire combien sont mythiques ces caïds italo-américains qui hantent le cinéma américain depuis Scarface d’Howard Hawks et les origines du film noir. C’est un autre expert qui s’est chargé d’écrire le scénario de The Alto Knights, Nicholas Pileggi, le collaborateur émérite de Martin Scorsese sur Les affranchis (1990) et Casino (1995). Une chronique mafieuse dans laquelle deux copains d’enfance deviennent ennemis presque malgré eux dans l’Amérique de 1957 ou J. Edgar Hoover règne sur le FBI.



Robert de Niro et Debra Messing



Aujourd’hui octogénaire, Barry Levinson signe un film comme on en voit de moins en moins, de ceux dont les studios ne semblent littéralement plus savoir quoi faire face à un public sollicité de toutes parts pour qui le cinéma n’est plus désormais qu’une variable d’ajustement presque comme les autres. Son générique témoigne toutefois de son ambition, avec pour producteur le légendaire Irwin Winkler et une équipe technique qui réunit notamment le chef opérateur de Michael Mann et le costumier de Christopher Nolan. Cette reconstitution soignée est constellée de standards musicaux vintage qui rythment une mécanique de précision dont le point d’orgue est constitué par une séquence d’anthologie où une centaine de chefs mafieux se retrouvent en rase campagne à l’occasion d’une garden-party dans la bourgade d’Apalachin qui va entrer dans l’histoire en faisant réaliser au FBI que la pègre a réussi à tisser sa toile sur l’ensemble du territoire américain, comme en attestent les plaques d’immatriculation des participants. La mise en scène de Levinson excelle à dépeindre ce portrait de groupe contraint à une débâcle précipitée, alors même que l’invité d’honneur se fait désirer et s’arrête… pour acheter des pommes. Il y a aussi une bonne dose d’humour dans ce film basé sur des faits authentiques pour lequel le réalisateur a mobilisé la fine fleur de ces acteurs de la communauté italo-américaine dont les visages nous sont bien souvent plus familiers que les noms. Quant à de Niro, sa double performance est vraiment mémorable par le soin qu’il prend pour être différent… en s’offrant même un clin d’œil à son personnage de Taxi Driver.

Jean-Philippe Guerand






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