Vlny Film tchéco-slovaque de Jirí Mádl (2024), avec Vojtech Vodochodský, Tatiana Pauhofová, Stanislav Majer, Ondrej Stupka, Martin Hofmann, Jan Nedbal, Vojtech Kotek, Marika Soposka, Thomas Mastalir, Matyás Reznicek, Jacob Erftemeijer, Igor Bares, Tomás Weber… 1h56. Sortie le 19 mars 2025.
On assiste depuis quelques mois à un retour vers le passé significatif en provenance de plusieurs territoires de l’ex-Bloc de l’Est qui résonne irrésistiblement comme un avertissement historique en écho à l’invasion du territoire ukrainien par les troupes russes depuis février 2022. Lauréat du prix du public au festival de Karlovy-Vary, le troisième long métrage du comédien tchèque Jirí Mádl illustre cette tendance en évoquant le Printemps de Prague à travers le destin d’un ingénieur du son engagé par une station de radio plutôt subversive, lequel va utiliser ses compétences techniques afin de contribuer à un véritable acte de résistance collective, en diffusant clandestinement des émissions et des messages destinés à relayer et à soutenir l’action des manifestants descendus dans les rues afin de s’opposer à la brutale reprise en main orchestrée par les forces gouvernementales sous influence soviétique. Une tentative de libération matée dans le sang qui chassera par contre-coup du pays une partie de son élite intellectuelle, à commencer par les réalisateurs Miloš Forman et Ivan Passer. Avec en filigrane la police secrète omniprésente qui exerce un chantage sur certains individus utilisés comme indicateurs.
Tatiana Pauhofová
Le film montre les dessous du totalitarisme à travers un groupe d’idéalistes contaminés par la soif de liberté soixante-huitarde dont les échos lui parviennent depuis l’autre versant du Rideau de Fer. Un leitmotiv qui a récemment inspiré en Pologne Varsovie 83, une affaire d'État de Jan P. Matuszynski et en Roumanie Radio Metronom d’Alexandru Belcet et Ce nouvel an qui n’est jamais arrivé de Bogdan Mureşanu (à l’affiche le 30 avril), primé à la dernière Mostra de Venise. Radio Prague, les ondes de la révolte met en scène des événements historiques que les médias de l’époque n’ont jamais eu le droit de filmer ni a fortiori de montrer en soulignant ainsi la puissance d’évocation inégalée du cinéma, grâce aux moyens que nécessite toute reconstitution, même si le théâtre des opérations se compose ici pour l’essentiel de quelques lieux impersonnels par définition difficiles à localiser pour les forces gouvernementales. Cette évocation soignée constitue par ailleurs un bel hommage à cette radio considérée dès ses débuts comme une arme de propagande massive, malgré ses moyens au fond limités. C’est aussi un avertissement sur les incertitudes brûlantes de la période contemporaine où l’Europe se trouve confrontée à ses pires démons par un réveil de l’impérialisme russe qui n’était sans doute qu’assoupi et a profité de notre coupable léthargie. À voir et à méditer comme un cours d’histoire magistral.
Jean-Philippe Guerand
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