Gou Zhen Film chinois de Hu Guan (2024), avec Eddie Peng, Liya Tong, Jia Zhangke, Zhang Yi, You Zhou, Jing Liang, Yuan Hong, Yi Zhao, Vision Wei, Jiuxiao Li… 1h50. Sortie le 5 mars 2025.
Eddie Peng
Aux confins du désert de Gobi, en d’autres termes au bout du monde, un homme de retour dans sa ville natale après avoir purgé une peine de prison se fait engager dans la patrouille motorisée chargée de le débarrasser des hordes de chiens errants qui l’envahissent sans relâche. Jusqu’au jour où il trouve en l’un d’eux, un lévrier altier, un compagnon fidèle et dévoué qui va redonner un semblant de sens à son existence en miettes. Black Dog est un film d’une rare élégance formelle dont la folie inattendue passe à la fois par une mise en scène dépouillée qui privilégie l’image et le son par rapport aux dialogues, tout en jouant en virtuose d’une utilisation spectaculaire de l’espace façonnée de plans d’ensemble impressionnants et de mouvements de caméra raisonnés qui contribuent à nous proposer une image inhabituelle de la Chine, contrée infinie aux paysages multiples dont le cinéma contemporain ne nous parvient plus qu’avec une grande parcimonie, à l’exception de quelques superproductions destinées à rivaliser avec Hollywood et Bollywood sur leur terrain de prédilection, et qui ne se réduit certainement pas qu’aux documentaires naturalistes de Wang Bing, bien qu’ils reflètent un certain ordre social le plus souvent filmé clandestinement dans le cadre de productions dépourvues de la moindre diffusion domestique faut du visa ad’hoc.
Eddie Peng et Liya Tong
Couronné du prix Un certain regard au Festival de Cannes 2024, cette fresque minimaliste où l’intime s’inscrit dans des espaces infinis a valu à son interprète à quatre pattes la fameuse Palm Dog. Black Dog tranche avec le cinéma chinois qu’on a l’habitude de voir en France : des films d’auteur purs et durs (Jia Zhangke tient d’ailleurs ici le rôle de l’oncle) et des superproductions spectaculaires désormais de taille à rivaliser avec les plus grands champions hollywoodiens, à l’instar de la saga à succès Creation of the Gods qui vient d’établir un nouveau record à l’international. Hu Guan ose avec ce film inscrire une intrigue simple et dépouillée dans un cadre spectaculaire qui évoque les décors post-apocalyptiques de la saga Mad Max. Avec en prime une reconstitution de l’éclipse de 2008 qui a précédé les Jeux olympiques de Pékin, unissant symboliquement le soleil et la lune dans une fusion symbolique entre le ciel et la terre. La valeur ajoutée du film repose sur un choix esthétique déterminant du réalisateur qui a choisi un format trop négligé, le 2.47, assez proche du Cinémascope, qui permet de donner au cadre une dimension spectaculaire et de transformer cette complicité entre un homme et un chien en une épopée intime dans des décors rarement vus sur grand écran. Voici une invitation au rêve qui ne se refuse pas.
Jean-Philippe Guerand
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