Film français de François Ozon (2024), avec Hélène Vincent, Josiane Balasko, Ludivine Sagnier, Pierre Lottin, Garlan Erlos, Sophie Guillemin, Malik Zidi, Paul Beaurepaire, Sidiki Bakaba, Pierre Le Coz, Michel Masiero, Vincent Colombe, Marie-Laurence Tartas… 1h42. Sortie le 2 octobre 2024.
Malik Zidi, Garlan Erlos et Hélène Vincent
François Ozon est sans doute aujourd’hui le réalisateur français le plus prolifique, au rythme métronomique d’un film par an et en alternant systématiquement les genres, comme pour éviter de lasser ses fidèles et continuer à faire ses gammes sur des registres divers. Après deux adaptations théâtrales radicalement antagonistes, le sombre Peter Von Kant (2022) inspiré par Rainer Werner Fassbinder et la comédie policière Mon crime (2023) tirée d’une pièce des Années Folles, il renoue dans son nouvel opus avec la veine de Sous le sable (2024) en s’interrogeant notamment sur les infortunes de l’âge et le fameux fossé des générations. Une vieille dame un rien fantasque se réjouit d’accueillir son petit-fils pour les vacances, mais souffre du mépris et de l’indifférence que lui manifeste sa fille établie à Paris (Ludivine Sagnier) en la sollicitant sous le moindre prétexte. Avec en filigrane un secret qu’elle partage avec sa meilleure amie dont le fils (Pierre Lottin) a quant à lui échoué en prison sous le poids d’une fatalité sociale. Doublement primé au festival de San Sebastián, Quand vient l’automne est à la fois une réflexion sur le vieillissement et la pesanteur des préjugés. Avec pour cadre une province rurale où le temps semble avoir suspendu son vol et où les fantômes du passé ont peu de risque de se manifester.
Hélène Vincent et Josiane Balasko
À partir d’un point de départ qui aurait pu engendrer un mélodrame, Ozon esquisse deux magnifiques portraits de femmes littéralement habitées par des actrices qui réussissent encore à surprendre malgré leur expérience : Hélène Vincent et Josiane Balasko. Il saupoudre en outre son récit de quelques éléments qu’on associe volontiers aux contes de fées, notamment une forêt et des champignons, avec le cortège de fantasmes qu’ils impliquent. Résultat : un film gigogne qui cultive le mélange des genres, mais plutôt que de suivre un itinéraire rectiligne nous entraîne sur le registre du polar, de l’étude de mœurs, du drame psychologique et même du fantastique. Car pour Ozon, le cinéma est aussi l’art de la déroute et qu’il n’entend surtout pas se laisser enfermer dans un registre plutôt qu’un autre, tant il se défie du confort et se méfie du conformisme. Quand vient l’automne est une œuvre en trompe-l’œil qui s’appuie sur les conventions du cinéma de genre afin de mieux les transgresser, en traitant de thèmes universels et en les orchestrant avec une science consommée de la mise en scène qui donne envie de voir le cinéaste exercer son talent sur un registre plus personnel. Le temps semble venu pour lui d’élever le niveau de ses ambitions. Quitte à sortir de sa zone de confort pour se mettre vraiment en danger. Sans sacrifier pour autant le rapport unique qu’il est parvenu à établir et à maintenir avec un public désormais prêt à le suivre dans toutes ses audaces. Et il n’en manque certainement pas.
Jean-Philippe Guerand
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