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“Silex and the City, le film” de Jul et Jean-Paul Guigue



Film d’animation français de Jul et Jean-Paul Guigue (2024), avec (voix) Guillaume Gallienne, Clément Sibony, Frédéric Pierrot, Michel Vuillermoz, Frédéric Beigbeder, Augustin Trapenard, François Hollande, Amélie Nothomb, Léa Salamé, Denis Ménochet, Sophia Aram, Lison Daniel, Alex Vizorek, Agnès Hurstel, Émilie Aubry, Ophelia Kolb, Raphaël Quenard, Océan, Félix Moati, Julie Gayet, Léa Drucker, Stéphane Bern, Nina Meurisse… 1h20. Sortie le 11 septembre 2024.





Personnalité singulière dans l’univers de la BD contemporaine, Jul a brossé dans la saga Silex and the City un portrait loufoque de notre société transposé parmi les hommes des cavernes, à grands renforts de clins d’œil et d’anachronismes savoureux. L’auteur s’inscrit délibérément dans la lignée de ces tontons farceurs que furent Marcel Gotlib et René Goscinny par sa volonté de s’adresser simultanément à des générations différentes pour ne pas avoir à bouder son plaisir, c’est-à-dire le nôtre. Après avoir donné lieu une série télévisée pour Arte composée d’épisodes de trois minutes, la fresque préhistorique accomplit ses débuts sur grand écran sous la houlette de son créateur associé à Jean-Paul Guigue qui a réalisé quant à lui quatre des cinq saisons de la série. Les deux compères exploitent habilement les moindres ressources du cinéma, notamment en réunissant un casting vocal de très grande classe qui mêle à la fois des comédiens de renom rompus à l’exercice et des personnalités médiatiques visiblement amusées par cette proposition, de François Hollande à Amélie Nothomb en passant par Stéphane Bern et Paul Larrouturou. Jul se prend au jeu avec une délectation communicative et imagine que les personnages animés se retrouvent projetés dans le monde moderne et confrontés à ses problèmes prosaïques, en l’occurrence une grande surface scandinave en jaune et bleu qui incarne le paradis pour ses clients, mais aussi une certaine idée de l’enfer pour nos ancêtres venus de la nuit des temps.





Au cœur de cette histoire, la famille DotCom résiste encore et toujours à l’évolution darwiniste quarante mille ans avant Jésus-Christ, alors même que ses parents enseignent respectivement la préhistoire-géo et la chasse à des élèves indignes de leur savoir. L’occasion pour Jul de croquer à pleines dents dans ce troisième millénaire débutant et d’en railler le mode de vie, les signes extérieurs, les mouvements de mode et l’inusable conflit des générations. Avec en lieu et place du fameux monolithe de 20001, l’odyssée de l’espace une banale clé coudée rapportée du futur qui laisse nos aïeux pour le moins circonspects quant à son usage véritable, faute de meubles en kit à monter et à démonter. Silex and the City, le film joue pleinement de toutes les possibilités inhérentes au cinéma d’animation, tout en demeurant fidèle à l’esprit de la BD et notamment à ce qui a largement contribué à son succès : cette transposition de la civilisation moderne dans un univers primitif qui a déjà tout compris des règles de la vie en société et de ses multiples travers. Un peu comme si Jul se proposait d’illustrer à sa manière et avec son humour à toute épreuve la formule bien connue “Si vous avez manqué le début…”. Précisons toutefois qu’il n’est nul besoin d’être familier voire expert de son univers pour goûter au charme subtil de ce film souvent désopilant où vraiment tout est permis. C’est même ce qui fait tout son charme.

Jean-Philippe Guerand




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