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“Super papa” de Léa Lando



Film français de Léa Lando (2024), avec Ahmed Sylla, Ismaël Bangoura, Zabou Breitman, Louise Coldefy, Julien Pestel, Sophie Vannier, Simon Zibi, Claudia Tagbo… 1h38. Sortie le 7 août 2024.



Ismaël Bangoura et Ahmed Sylla



La paternité se trouve au cœur de nombreux films, généralement sur une tonalité plutôt souriante. Il y a même déjà eu un Super papa campé il y a une vingtaine d’années par l’humoriste américain Tim Allen et un autre pour le petit écran interprété pas plus tard que l’an dernier par Michaël Youn. Celui qu’incarne aujourd’hui Ahmed Sylla est un éternel adolescent plutôt insouciant qui se retrouve confronté à des responsabilités qui le dépassent, suite à la disparition brutale de sa compagne, avec une ex-belle-mère (Zabou Breitman à contre-emploi) à l’affût qui aimerait bien obtenir la garde de son petit-fils (Ismaël Bangoura à croquer) pour lui prodiguer une éducation digne de ce nom et sans doute aussi trouver un sens à sa propre solitude de senior hyperactive. Toutes les composantes d’une tragi-comédie familiale se trouvent donc rassemblés, avec dans le rôle-titre l’irrésistible Ahmed Sylla qui tranche avec ses rivaux par sa gentillesse naturelle et occupe en tant que tel une place à part dans le paysage de la comédie française, sans concurrence véritable sur ce créneau, malgré le succès insuffisant de ses derniers films : Notre tout petit mariage (354 000 entrées), Comme un prince (245 000 entrées) et Ici et là-bas (334 000 entrées). Au point que son sourire est devenu son plus sûr atout et que sa personnalité détonne dans un cinéma français populaire où les humoristes se caractérisent le plus souvent par leur insolence, leur goût pour la provocation voire parfois une certaine vulgarité. Rien de tout cela évidemment ici, dans la mesure où notre héros incarne un veuf inconsolable qui peine à briller aux yeux de son rejeton, sinon au volant du cabriolet de sa chère disparue.



Ismaël Bangoura, Zabou Breitman et Ahmed Sylla



Super papa recycle une recette qui a fait ses preuves autour de films tels que Kramer contre Kramer (1979) avec l’inoubliable pain perdu de Dustin Hoffman et les deux Monsieur papa incarnés à plus de trois décennies de distance par Claude Brasseur puis Kad Merad. Des films qui permettent de mesurer le chemin accompli par ces pères célibataires, qu’ils soient veufs ou divorcés, pour assumer leur rôle ingrat, face à cette idée dépassée selon laquelle c’est aux femmes qu’il reviendrait d’élever les enfants. Une notion submergée par l’évolution des mœurs et l’irrésistible montée en puissance des familles monoparentales et la reconnaissance de la garde partagée. Super papa met donc en scène sous la houlette d’une réalisatrice débutante, Léa Lando, un type immature contraint par les circonstances à se battre pour la garde de son fils en trouvant sa juste place, quitte à se faire passer pour celui qu’il n’est pas vraiment : un héros condamné à s’inventer des exploits qu’il a parfois du mal à mener jusqu’à leur terme. C’est la meilleure partie de cette comédie qui n’a pas d’autre prétention que d’être charmante, quitte à laisser en permanence au spectateur quelques plans d’avance sur les personnages, plaisir coupable qui va souvent de pair avec le concept même des Feel Good Movies, ces films de pure distraction qui affichent pour unique ambition de faire du bien sans chercher midi à quatorze heures. Avec le sourire désarmant et communicatif d’Ahmed Sylla.

Jean-Philippe Guerand






Ismaël Bangoura et Ahmed Sylla

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