Film américain de Paul Feig (2024), avec John Cena, Awkwafina, Simu Liu, Ayden Mayeri, Sean William Scott, Dolly de Leon, Donald Elise Watkins, Michael Hitchcock, Becky Ann Baker, Sam Asghari, Leslie David Baker, Murray Hill… 1h44. Mise en ligne sur Prime Video le 15 août 2024.
Awkwafina
Los Angeles, 2030. Le retour de la grande dépression survenu quatre ans plus tôt a incité l’État à instituer une loterie nationale qui remporte un succès d’autant plus grand que dès lors qu’un gagnant a été désigné, il devient la cible de tous les autres joueurs. S’engage dès lors un combat qui permet au pactole de passer de mains en mains tout en condamnant ses vainqueurs à plus ou moins brève échéance. Ce sujet de science-fiction doit autant à La dixième victime (1965) d’Elio Petri qu’au Prix du danger (1983) d’Yves Boisset et à son plagiat avéré Running Man (1987) de Paul Michael Glaser. Dans tous les cas, il s’agit de dénoncer le voyeurisme et la rapacité. Jackpot ! se présente comme une poursuite infernale dont l’issue semble inéluctable : il n’y aura que des perdants. Par ailleurs, tous les coups sont permis pour satisfaire les plus bas instincts des humains condamnés à la misère. On est plus près cette fois de l’esprit apocalyptique de la saga à succès American Nightmare dont l’objectif était quant à lui de lutter efficacement contre la surpopulation carcérale. Avec ce fil rouge qui consiste à solutionner tous les problèmes par une violence banalisée qui se déchaîne entre le tirage au sort et le coucher du soleil.
John Cena et Awkwafina
Le film repose sur la chance à double tranchant d’une actrice en quête de notoriété qui décroche malgré elle le pactole tant convoité en devenant une cible mouvante, le tout dans une atmosphère pour le moins éruptive et avec un garde du corps élégant que campe le toujours placide John Cena face à une foule déchaînée. Une association pittoresque confiée à un spécialiste de la comédie en la personne de Paul Feig, ci-devant réalisateur de succès tels que Mes meilleures amies (2011) et le reboot de S.O.S. Fantômes (2016). C’est lui qui tire ce sujet à forte connotation sociologique vers le pur spectacle, en mettant en scène une belle brochette de doux dingues mus par leurs plus bas instincts. Menacée de toutes parts, la très expressive Awkwafina oppose à ce déchaînement irrationnel d’agressivité son bon sens et son humour, justifiant son ignorance de provinciale au détour d’une phrase en affirmant qu’elle a toujours sacrifié les actualités télévisées qu’elle trouvait trop anxiogène au profit du cinéma. CQFD ? Jackpot ! va au bout de son sujet en l’épuisant et joue délibérément la carte de la folie débridée, dépeignant la Californie comme une jungle urbaine redoutable dont la population toute entière semble mue par un appât du gain qui illustre la formule antique de Juvénal “ Du pain et des jeux. ” Cette course folle au ticket gagnant libérant les plus bas instincts d’une population aux abois qui meuble ainsi son oisiveté forcée en se battant pour échapper à la misère. Un sujet très sérieux traité ici avec un sourire plutôt en coin.
Jean-Philippe Guerand
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