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“Les trois fantastiques” de Michaël Dichter



Film français de Michaël Dichter (2023), avec Diego Murgia, Emmanuelle Bercot, Raphaël Quenard, Jean Devie, Benjamin Tellier, Maxime Bailleul… 1h35. Sortie le 15 mai 2024.



Jean Devie, Diego Murgia et Benjamin Tellier



Le Teen Movie est un genre typiquement anglosaxon qui n’a produit que peu d’œuvres mémorables en France sinon quelques chroniques lycéennes telles que Diabolo menthe (1977), La boum (1980), Le péril jeune (1994), LOL (2008) ou les beaux gosses (2009). En revanche, peu ou pas d’équivalents aux comédies délirantes du regretté John Hughes, aux Goonies (1985) de Richard Donner ou à Stand By Me (1986) de Rob Reiner qui exaltaient des graines d’aventuriers intrépides sur une tonalité nostalgique. Bien que son titre renvoie à un classique du film de super-héros, le premier long métrage de Michaël Dichter s’attache en fait à des gamins de province en quête de sensations fortes, comme on a pu en croiser récemment dans La petite bande de Pierre Salvadori et Juniors de Hugo P. Thomas. Dans les Ardennes en voie de désindustrialisation, le temps d’un été, trois copains succombent à la mauvaise influence d’un grand frère tout juste sorti de prison et dépourvu d’états d’âme (le toujours juste Raphaël Quenard) qui les entraîne dans ses combines minables. C’est par son ancrage social fouillé et sa peinture désenchantée d’une province au fond assez peu représentée à l’écran que s’impose ce film d’une grande justesse, en marge des conventions du genre dont les dialogues sonnent avec une justesse particulière.



Diego Murgia et Raphaël Quenard



Derrière son titre accrocheur, Les trois fantastiques s’impose par sa finesse, mais aussi par un mélange des genres assez rare, mais très efficace. Michaël Dichter y décrit cette période de la vie où l’école gomme en partie les différences sociales et où la camaraderie ne s’embarrasse pas de ce genre de considérations, sinon quand c’est à l’instigation des parents conditionnés par des réflexes de classe. Son cadre villageois situe autant le film hors de l’espace que du temps et confronte en quelque sorte l’innocence de ses jeunes protagonistes à des adultes désabusés sinon aigris, comme une projection éventuelle de leur vie en devenir, s’ils n’accomplissent pas les bons choix. C’est dans ce contexte particulier que la musique occupe une place fondamentale et entretient le cousinage entre ce film solidement ancré dans son cadre provincial où tout semble plus immuable qu’en ville parce que tout y change à un autre rythme et que le passé semble systématiquement plus rassurant que l’avenir. Un univers immobile tel qu’en décrit rarement le cinéma français, tant il détonne avec la dictature de la vitesse qui régit le cinéma moderne, sous prétexte qu’un consommateur de plateformes qui n’accroche pas dès les premières minutes risquerait de zapper. C’est tout à l’honneur des Trois fantastiques de ne jamais tomber dans ce piège de la frénésie systématique et de prendre le temps suffisant pour nous immerger dans son petit monde.

Jean-Philippe Guerand






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