The Dead Don’t Hurt Film mexicano-canado-danois de Viggo Mortensen (2023), avec Vicky Krieps, Viggo Mortensen, Solly McLeod, Garret Dillahunt, W. Earl Brown, Danny Huston, Shane Graham, Colin Morgan, Ray McKinnon, Alex Breaux, Michael Weaver, Nadia Litz, Jason Clarke… 2h09. Sortie le 1er mai 2024.
Viggo Mortensen
Singulière destinée que celle du comédien Viggo Mortensen propulsé au firmament du cinéma mondial grâce au rôle d’Aragorn dans la trilogie du Seigneur des anneaux. Une notoriété qu’il a mise à profit pour soutenir davantage de films d’auteur que de grosses productions commerciales. Passé à la réalisation avec Falling (2020), un drame familial intense, il retourne aujourd’hui aux sources du cinéma hollywoodien en signant un western anticonformiste comme d’autres acteurs s’y sont essayés avant lui, de Jack Nicholson à Kevin Costner. Il s’y confronte à ses véritables origines dans le rôle d’un immigrant danois qui entraîne une Canadienne française dans le Nevada, mais doit bientôt la laisser pour s’engager dans la guerre de Sécession, tandis qu’elle doit faire face au harcèlement d’un maire corrompu, d’un riche propriétaire terrien et de son fils. Quand ils se retrouvent enfin, la vie les a changés et aussi endurcis. Une approche psychologique qui tranche avec la tradition habituelle du western et où la guerre de Sécession est une composante déterminante mais elliptique qui est davantage évoquée par ses conséquences que décrite dans son déroulement même.
Viggo Mortensen et Vicky Krieps
Jusqu’au bout du monde s’attache à un couple qui n’aspire qu’à mener une vie de famille paisible dans un monde encore dominé par la violence et des rapports de force assez basiques. Une fatalité que tente de déjouer cet homme idéaliste qui a compris que la seule route possible vers le bonheur passe par une paix des braves assez hypothétique. Ces gens normaux ont d’autant plus de mérite à s’accrocher à leurs rêves que le monde autour d’eux déborde de bruit et fureur. Viggo Mortensen prend en quelque sorte la tradition du western à contre-courant, en montrant ce stade où la barbarie et la violence endémique pouvaient susciter une alternative à ce qui était alors considéré comme une fatalité, à travers l’avènement d’un monde pacifié où l’humanité retrouverait ses droits. À cette nuance près que représente le fameux deuxième amendement de la constitution américaine qui octroie à tous les citoyens le droit inaliénable de détenir une arme pour contribuer « à la sécurité d'un État libre », c’est-à-dire pouvoir se défendre et par extension… attaquer. L’idéaliste campé par Mortensen ne se dérobe pas devant ses responsabilités. Bien au contraire, puisqu’il est successivement shérif puis soldat. En revanche, il a en quelque sorte une longueur d’avance sur ses contemporains et a compris que le seul moyen d’accéder au bonheur et à l’harmonie consiste à se mettre en retrait définitivement de cette violence endémique. Telle est la morale anticonformiste de ce beau film idéaliste dans lequel Eros triomphe de Thanatos.
Jean-Philippe Guerand
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