Inside Film greco-germano-belgo-britanno-suisse de Vasilis Katsoupis (2023), avec Willem Dafoe, Gene Bervoets, Eliza Stuyck, Josia Krug, Andrew Blumenthal, Vincent Eaton… 1h45. Sortie le 1er novembre 2023.
Willem Dafoe
Le minimalisme est un stimulant de choix pour le cinéma qui en a souvent tiré d’authentiques tours de force. À l’intérieur répond très précisément à cette définition en mettant en scène un gentleman cambrioleur qui se retrouve prisonnier de l’appartement futuriste de Manhattan où il est parvenu à pénétrer sans effraction afin d’y dérober trois œuvres d’Egon Schiele pour un commanditaire invisible… dont un portrait qu’il ne parvient pas à trouver. Un monte-en-l’air au sens propre de cette expression puisqu’il s’est introduit dans cette tour de verre surprotégée en prenant des risques inconsidérés, avant de déclencher le système d’alarme par étourderie. Il s’agit d’ailleurs là du principal morceau de bravoure de ce film de casse dont Willem Dafoe tient le rôle principal avec son charisme incomparable. Seul contre tous et coupé du monde dans ce penthouse aussi hermétique que Fort Knox où il s’avère ironiquement plus facile d’entrer que de sortir. Au point que le film raconte en temps réel les derniers instants d'un condamné en sursis qui profite de ses derniers moments de liberté, sans véritablement chercher à échapper au piège dans lequel il s'est lui-même jeté. Un postulat élémentaire dont Edgar Poe aurait apprécié le défi ludique, tant il stimule l’imagination à partir de composantes réduites à leur plus simple expression, mais mises à profit avec une roublardise efficace.
Willem Dafoe
Remarqué pour son documentaire My Friend Larry Gus (2016), le cinéaste grec Vasilis Katsoupis met en scène dans son premier long métrage de fiction un scénario dont il a lui-même donné l’idée à Ben Hopkins, ci-devant réalisateur d’une adaptation remarquée de Simon le magicien (1999). Il délimite ici les abscisses et les ordonnées d’un espace confiné dans lequel un homme se retrouve prisonnier. Un postulat d’autant plus contraignant en termes de mise en scène qu’il ne comporte aucune issue. Il faut toute la roublardise du très polyvalent Willem Dafoe pour exploiter les moindres facettes de son personnage, sans céder pour autant à l’ivresse de la toute-puissance que pourrait lui inspirer sa solitude ni multiplier les morceaux de bravoure pour conjurer l’ennui lié à sa situation. À l’intérieur réussit pourtant la prouesse de n’être jamais ni ennuyeux ni même ronronnant. Par sa seule présence, l’acteur réussit à donner une autre dimension à ce huis clos, sans pour autant jouer non plus la carte du tour de force à tout prix. Le film s’inscrit en fait dans la lignée de ces œuvres comme Denise au téléphone (1995) d’Hal Salwen ou Buried (2010) de Rodrigo Cortés qui s’appuient sur un postulat réduit à sa plus simple expression pour en épuiser toutes les possibilités, sans jamais dévier de leur objectif. Mais il faut pour cela la conjonction de trois facteurs : un scénario rigoureux, un(e) interprète impeccable et une mise en scène au cordeau. Trois qualités fondamentales que conjugue ce film en forme d’exercice de style dénué d’esbroufe.
Jean-Philippe Guerand
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