Bên trong vỏ kén vàng Film vietnamo-franco-hispano-singapourien de Pham Thiên Ân (2023), avec Le Phong Vu, Nguyen Thi Truc Quynh, Nguyen Thinh, Vu Ngoc Manh… 2h58. Sortie le 20 septembre 2023.
Le Phong Vu et Vu Ngoc Manh
Voici un film qui ne s’appréhende pas tout à fait comme les autres. Présenté en première mondiale à la Quinzaine des cinéastes du Festival de Cannes, il avait le suprême avantage de ne susciter qu’une curiosité empreinte de bienveillance. Couronné de la prestigieuse Caméra d’or qui consacre par essence le meilleur premier film, toutes sections confondues, en prenant un pari fort sur l’avenir, L’arbre aux papillons d’or affiche des partis pris d’autant plus affirmés qu’ils ont tendance à se raréfier et ne semblent concerner qu’une poignée de cinéastes internationaux dont le chef de file semble être le réalisateur turc Nuri Bilge Ceyalan. D’abord par sa durée qui approche les trois heures et témoigne d’une ambition audacieuse. Un parti pris d’autant plus saisissant qu’il ne s’applique pas à une fresque, mais plutôt à un Road Movie introspectif qui touche au comble de l’intime. Un homme dont la belle-sœur a péri dans un accident de moto ramène la dépouille de la disparue dans son village natal, en compagnie de son neveu de 5 ans qui est sorti indemne de cette tragédie. Un périple qui atteint au surnaturel lorsqu’il met à profit ce retour aux sources pour partir à la recherche de son frère aîné disparu depuis des années. D’une situation quasiment anecdotique, Pham Thiên Ân tire une quête mystique qui confère à ses paysages somptueux une aura d’éternité. Ce film ambitieux n’est pourtant à aucun moment contemplatif ni même complaisant. Il déroule son fil narratif à son rythme et montre combien le peuple vietnamien fait corps avec sa terre et comment il vit en bonne intelligence avec ses aïeux à travers sa foi.
Le Phong Vu et Nguyen Thi Truc Quynh
Ce film fleuve scandé en plans-séquences, comme autant de respirations, révèle en son metteur en scène un visionnaire qui ose se confronter à des problématiques vertigineuses en soulignant à quel point l’urbanisation et le matérialisme à outrance ont contribué à couper les individus de leurs considérations les plus élevées. En accomplissant ce retour aux origines, le personnage principal de L’arbre aux papillons d’or se livre simultanément à une authentique épreuve initiatique qui l’incite à réviser sa hiérarchie personnelle de valeurs et à aller droit à l’essentiel en convoquant des croyances ancestrales qui ont l’insigne mérite de soulager la douleur par leur propension à distiller de l’espoir. Au point de basculer dans une autre dimension où le culte des morts se célèbre en bonne intelligence avec l’accomplissement du destin des vivants. Une cohabitation harmonieuse qui abolit les frontières, mais n’implique pas nécessairement une croyance traditionnelle en Dieu. C’est en abolissant les frontières que ce film nous fait toucher à l’essentiel en nous proposant une approche du fantastique au fond assez rationnelle qui convoque la nature dans ce qu’elle peut avoir de plus mystérieux. Avec ce film d’une beauté terrassante, Pham Thiên Ân pose les premiers jalons d’une œuvre qui pourrait révéler un émule asiatique de Tarkovski ou d’Angelopoulos inspiré par la beauté du monde. Un grand cinéaste est né…
Jean-Philippe Guerand
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