Sisu Film finlandais de Jalmari Helander (2022), avec Jorma Tommila, Aksel Hennie, Jack Doolan, Onni Tommila, Mimosa Willamo, Arttu Kapulainen, Vincent Willestrand, Elina Saarela… 1h31. Sortie le 21 juin 2023.
Elina Saarela et Mimosa Willamo
De la Seconde Guerre mondiale, on croit trop souvent tout avoir vu ou presque. Il arrive cependant que des films s’aventurent dans des zones encore inexplorées, sans nécessairement veiller à respecter scrupuleusement la réalité historique. Le temps des reconstitutions scrupuleuses semble désormais révolu. Du cinéma finlandais, on ne connaît par ailleurs à peu près rien, sinon quelques fresques polaires illuminées par le fameux soleil de minuit. Sisu - De l’or et du sang s’inscrit dans la veine d’un film comme Inglorious Basterds de Quentin Tarantino par la radicalité assumée de son parti pris iconoclaste et une stylisation qui relève autant de la BD que du cartoon. Son héros est une sorte d’homme des bois au verbe rare sinon absent dont la misanthropie naturelle s’accommode en fait assez mal du sort infligé à son peuple par des hordes nazies qu’on croirait échappées d’un fleuron italien du cinéma d’exploitation. Seul contre tous, il va pourtant réussir ce que ni l’armée nationale ni la résistance locale n’ont même entrepris : chasser définitivement l’envahisseur teuton venu souiller sa terre dans un baroud d’honneur de folie mégalomane. Le réalisateur Jalmari Helander convoque pour cela des références qui vont du western spaghetti aux plus folles excentricités du cinéma bis. Le tout avec une modernité qui s’affiche à travers sa description d’une bande de femmes bien décidées à s’emparer de leur destin et à prendre en quelque sorte leur revanche sur l’histoire, en boutant la force des mâles hors de leur territoire.
Jack Doolan et Aksel Hennie
Le titre du film donne sa teneur, même s’il semble difficilement traduisible. Sisu désigne en effet en finnois un courage mâtiné de détermination qui permet de venir à bout des obstacles les plus insurmontables. En l’occurrence ici, le héros malgré lui est un ancien soldat passablement perturbé qui va se battre pour protéger le gisement d’or providentiel qu’il a découvert au fin fond de la Laponie. Quitte à affronter pour cela des SS sans foi ni loi, en opposant à leur logistique militaire les moindres ressources de son imagination le franc-tireur. Un combat inégal qu’on devine gagné d’avance par ce bon sauvage en lutte contre la barbarie. Fortement influencé par l’esthétique des années 80 et ces personnages seuls contre tous immortalisés par Sylvester Stallone dans Rambo et Bruce Willis dans Piège de cristal, Sisu - De l’or et du sang aspire moins au réalisme et à la vraisemblance qu’à une esthétique de l’emphase où la déraison du plus fort n’est jamais la meilleure, face à un simple quidam capable de se transcender. Résultat, un film d’action au prétexte historique mené comme un jeu vidéo de type shoot’em up où tous les coups sont permis. Un exercice de style rondement mené qui assume son manichéisme avec une jubilation communicative ponctuée de quelques morceaux de bravoure savoureux où la violence s’accommode d’un humour résolument corrosif. Avec, dans le rôle très physique du justicier solitaire au verbe rare de ce joyeux joyau, Jorma Tommila, un acteur de théâtre auquel le même réalisateur avait déjà confié précédemment… le rôle du Père Noël !
Jean-Philippe Guerand
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