Film français de Florence Vignon (2023), avec Zita Hanrot, Jacques Gamblin, Cédric Moreau, Tatiana Gousseff, Thomas Chabrol, Vincent Jaspard, Bruno Abraham-Kremer, Carima Amarouche, Saadia Bentaïeb, Gaël Kamilindi, Florence Vignon… 1h26. Sortie le 17 mai 2023.
Zita Hanrot
Avant de passer à la réalisation, Florence Vignon s’est fait connaître en tant que scénariste de plusieurs films de Stéphane Brizé : Le bleu des villes (1999), Mademoiselle Chambon (2009), Quelques heures de printemps (2012) et Une vie (2016). Elle a choisi pour débuter un sujet solidement ancré dans la société contemporaine, comme en a souvent tourné son partenaire de prédilection. Mais sur une tonalité résolument plus humaine que sociale. Représentant dans une entreprise de papier peint, Henri Giffard refuse de prendre la retraite anticipée qu’on lui propose. Ses supérieurs font miroiter un contrat à durée indéterminée à une jeune femme fraîchement recrutée, à la condition qu’elle persuade son aîné de partir… En mettant ainsi en balance deux destins que tout semble opposer, sinon pour des comptables obsédés par leur masse salariale, L’homme debout stigmatise un monde sans pitié où tous les coups sont permis, sous peine qu’ils servent à assouvir des ambitions économiques dépourvues du moindre affect. Florence Vignon résout cette équation moralement douteuse en s’appuyant sur deux protagonistes qui refusent de se comporter comme de bons petits soldats au service d’intérêts qui les dépassent.
Jacques Gamblin et Vincent Jaspard
L’homme debout est un éloge de l’honneur qui doit beaucoup à la personnalité de ses interprètes. Le mouton enragé qui donne son titre au film par son refus de se soumettre est incarné par Jacques Gamblin en employé solitaire exerçant son métier comme un sacerdoce qui y a tant investi qu’il sait que la retraite ne le mènera que plus rapidement au trépas. Quant à la jeune femme chargée de s’en débarrasser, c’est Zita Hanrot, une nouvelle fois impeccable dans un rôle jamais manichéen. Par son attitude, elle démontre qu’il est possible de résister aux pressions qu’exerce le monde du travail, pour peu qu’on se laisse guider par son libre-arbitre et qu’on ne se résigne pas à cette loi du plus fort qui est rarement la meilleure, contrairement à ce qu’on enseigne trop souvent aux élèves des écoles de commerce appelés à devenir les serviteurs zélés d’intérêts industriels occultes. Florence Vignon s’attelle à montrer que ce mode de fonctionnement n’est en aucun cas une fatalité, en choisissant pour protagonistes des gens bien élevés qui ont la faiblesse de s’en remettre à leur dignité morale. C’est à mettre au crédit de ce film jamais mièvre qui s’en remet pour une bonne part à la personnalité de ses interprètes et suscite l’enthousiasme inhérent aux œuvres de salubrité publique, comme le cinéma contemporain semble malheureusement en avoir perdu le goût en prenant ses distances avec le monde du travail… sinon dans les films de Stéphane Brizé interprétés par Vincent Lindon et quelques documentaires. La nouvelle génération ne s’y trompe d’ailleurs pas qui refuse de plus en plus l’hégémonie de la fameuse “valeur travail” en se tournant résolument vers des moyens d’épanouissement alternatifs.
Jean-Philippe Guerand
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