Film français de Cécilia Rouaud (2023), avec François Damiens, William Lebghil, Laura Felpin, Bruno Podalydès, Vanessa Paradis, Genti Kame, Alicia Hava, Emilie Cazenave, Jean-François Cayrey, Benjamin Gomez, Lucile de La Morena, Diane Robert, Mathieu Lardot… 1h38. Sortie le 12 avril 2023.
François Damiens
Un tueur à gages indisposé par la vue du sang décide de raccrocher. Mais c’est compter sans son employeur qui met un contrat sur lui. Condamné à se défendre, il se retrouve escorté par un jeune couple de voisins sympathique mais un peu envahissant qui ignore tout de ses activités criminelles. De ce point de départ qui aurait pu inspirer Francis Veber, Les complices tire une comédie plutôt savoureuse qui doit beaucoup à la qualité de ses interprètes et à leur jubilation communicative. François Damiens joue à merveille du contraste qui existe entre sa stature imposante et sa sensibilité dans le rôle de ce tueur en proie aux handicaps de sa nature profonde qu’on pourrait qualifier de maladie professionnelle. La fantaisie naturelle de William Lebghil trouve ici matière à se décliner sur un registre de naïf de comédie aux yeux écarquillés sur le monde auquel l’ont préparé plusieurs de ses compositions antérieures dans des films tels que Première année et Grand Paris, actuellement à l’affiche. Il se voit en outre associé à une nature explosive en la personne de Laura Felpin qui impose sa nature volcanique dans un rôle de nature à booster sa carrière cinématographique sur un registre où les femmes ne sont pas si nombreuses que ça. Des débuts au cinéma tonitruants pour une nature explosive qui pourrait marcher sur les traces de Jacqueline Maillan et Valérie Lemercier dans un registre fantaisiste encore trop peu investi par les femmes, généralement plutôt cantonnées dans des emplois de faire-valoir dénués d’épaisseur.
Laura Felpin, Vanessa Paradis et William Lebghil
Par son association pittoresque d’un tueur trop émotif qui vit dans le souvenir de son épouse perdue (Vanessa Paradis, absolument poignante en trois scènes) et d’un couple qui se prend à son jeu dangereux, Les complices renoue avec une tradition comique qui ne joue pas exclusivement la carte du rire, mais aussi sur le contraste physique qui sépare l’ineffable François Damiens, colosse aux émois de midinette, de ses partenaires. Avec en prime le réalisateur pince-sans-rire Bruno Podalydès dans le rôle d‘un parrain raisonneur. C’est ce décalage assumé entre les personnages et leurs interprètes sur un registre de comédie policière auquel Georges Lautner offrit naguère quelques-uns de ses plus beaux morceaux de bravoure qui permet à ce film d’imposer sa petite musique virevoltante dans un cinéma français souvent trop paresseux pour creuser son imagination. Avec en prime quelques rares échappées vers des extravagances qu’assument en se pinçant le nez des acteurs pas toujours suffisamment investis dans leurs rôles. En espérant que cette réussite se transforme en succès au box-office et ouvre la voie à une nouvelle vague de comédies moins stéréotypées et plus incarnées que celles qui nous sont proposées depuis quelques années. Le petit écran s’est substitué sur ce registre au manque d’ambition du grand dans ce domaine abandonné à quelques francs-tireurs, de la Bande à Fifi au Palmashow, en passant par Quentin Dupieux. Les complices emprunte une autre voie, sans doute plus universelle, où tous les coups semblent permis, du moment que c’est au profit du rire.
Jean-Philippe Guerand
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