Accéder au contenu principal

“Les têtes givrées” de Stéphane Cazes



Film français de Stéphane Cazes (2022), avec Clovis Cornillac, Claudia Tagbo, Marwa Merdjet Yahia, Malonn Lévana, Betina Flender, Shirel Nataf, Maïssa Diawara, Louis Durant, Matteo Salamone, Anthony Guignard, Raphaël Lemelle… 1h42. Sortie le 8 février 2023.





L’instituteur de la classe de Section d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa) d’un collège niché au pied du Mont Blanc décide un beau jour d’emmener ses élèves en excursion afin de leur faire découvrir la beauté de la nature environnante dont aucun d’eux ne semblait soupçonner l’existence si près de chez eux. Une excursion qui va inciter les adolescents à prendre fait et cause pour un glacier, irrémédiablement menacé de disparition par la fonte des neiges. Voici une comédie animée d’une fibre écologique dans l’air du temps, mais affublée d’un titre d’une calamiteuse vulgarité, de nature à rebuter le public en droit de s’attendre à une bouffonnerie aussi indigeste qu’une tartiflette. Ce serait d’autant plus regrettable que les comédies françaises de qualité ne courent pas les écrans et que le deuxième film de Stéphane Cazes (remarqué il y a une dizaine d’années sur un tout autre registre avec Ombline) est sous-tendu par un propos plus sérieux qu’il ne pourrait y paraître. L’urgence écologique y va de pair avec la situation inconfortable de ces gamins orientés vers des classes de transition qui ne les mènent bien souvent nulle part, en achevant de les dégoûter des études et de les braquer aussi parfois un peu plus contre ces adultes irresponsables qui malmènent allègrement la planète en hypothéquant de façon irresponsable un avenir qui ne leur appartient pas.





Les têtes givrées est une comédie pourvue d’une humanité et d'un sens des responsabilités qui font toute la différence. On déplore assez souvent que le cinéma français ait choisi de se déconnecter de la réalité sous prétexte de faire rire à tout prix. C’est oublier que la plupart des fleurons du genre reposaient bien souvent sur un propos sérieux et très articulé voire dans le meilleur des cas sur une observation sociale aiguë dont Coline Serreau fait figure de championne. Stéphane Cazes perpétue cette tradition sur un ton bon enfant, avec la complicité du très populaire Clovis Cornillac en enseignant qui a une revanche à prendre sur la vie et n’est pas sans rappeler le pédagogue de rêve incarné par Robin Williams dans Le cercle des poètes disparus. Avec en prime un propos citoyen sur la protection de l’environnement qui confère à ce Feel Good Movie un précieux supplément d’âme. Il suffit juste de passer outre son titre débile (adopté comme totem par les gamins unis pour sauver leur glacier) pour apprécier la finesse de ce film pétri de bonnes intentions mais jamais mièvre, notamment grâce à une poignée de jeunes interprètes aussi attachants que talentueux et à un véritable engagement en faveur d’une cause qui nous concerne tous et nécessite une mobilisation générale et immédiate, sous peine de voir la nature dévastée, avec toutes es conséquences que cela implique.

Jean-Philippe Guerand









Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Le paradis des rêves brisés

La confession qui suit est bouleversante… © A Medvedkine Elle est le fait d’une jeune fille de 22 ans, Anna Bosc-Molinaro, qui a travaillé pendant cinq années à différents postes d’accueil à la Cinémathèque Française dont elle était par ailleurs une abonnée assidue. Au-delà de ce lieu mythique de la cinéphilie qui confie certaines tâches à une entreprise de sous-traitance aux méthodes pour le moins discutables, CityOne (http://www.cityone.fr/) -dont une responsable non identifiée s’auto-qualifie fièrement de “petit Mussolini”-, sans nécessairement connaître les dessous répugnants de ses “contrats ponctuels”, cette étudiante éprise de cinéma et idéaliste s’est retrouvée au cœur d’un mauvais film des frères Dardenne, victime de l'horreur économique dans toute sa monstruosité : harcèlement, contrats précaires, horaires variables, intimidation, etc. Ce n’est pas un hasard si sa vidéo est signée Medvedkine, clin d’œil pertinent aux fameux groupes qui signèrent dans la mouva

Bud Spencer (1929-2016) : Le colosse à la barbe fleurie

Bud Spencer © DR     De Dieu pardonne… Moi pas ! (1967) à Petit papa baston (1994), Bud Spencer a tenu auprès de Terence Hill le rôle de complice qu’Oliver Hardy jouait aux côtés de Stan Laurel. À 75 ans et après plus de cent films, l’ex-champion de natation Carlo Pedersoli, colosse bedonnant et affable, était la surprenante révélation d’ En chantant derrière les paravents  (2003) d’Ermanno Olmi, Palme d’or à Cannes pour L’arbre aux sabots . Une expérience faste pour un tournant inattendu au sein d’une carrière jusqu’alors tournée massivement vers la comédie et l’action d’où émergent des films comme On l’appelle Trinita (1970), Deux super-flics (1977), Pair et impair (1978), Salut l’ami, adieu le trésor (1981) et les aventures télévisées d’ Extralarge (1991-1993). Entrevue avec un phénomène du box-office.   Rencontre « Ermanno Olmi a insisté pour que je garde mon pseudonyme, car il évoque pour lui la puissance, la lutte et la violence. En outre, c’était

Jean-Christophe Averty (1928-2017) : Un jazzeur sachant jaser…

Jean-Christophe Averty © DR Né en 1928, Jean-Christophe Averty est élève de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques (Idhec) avant de partir travailler en tant que banc-titreur pour les Studios Disney de Burbank où il reste deux ans en accumulant une expertise précieuse qu'il saura mettre à profit par la suite. De retour en France, il intègre la RTF en 1952 où il réalisera un demi-millier d'émissions de radio et de télévision dont Les raisins verts (1963-1964) qui assoit sa réputation de frondeur à travers l'image récurrente d'une poupée passé à la moulinette d'un hachoir à viande et pas moins de 1 805 numéros des Cinglés du music-hall (1982-2006) où il exprime sa passion pour la musique, sur France Inter, puis France Culture, lui, l'amateur de jazz à la voix inimitable chez qui les mots semblent se bousculer. Fin lettré et passionné par les images, l’iconoclaste Averty compte parmi les pionniers de la vidéo et se caract