Film français de Yann Samuell (2022), avec Léonard Fauquet, Loup Pinard, Mathys Gros, Tom Castaing, Paloma Lebeaut, Isabelle Carré, Didier Bourdon, François Damiens, Alex Lutz, Ahmed Sylla, Luc Schiltz… 1h49. Sortie le 18 janvier 2023.
Léonard Fauquet, Loup Pinard
Mathys Gros et Tom Castaing
Voici un film qui déroute autant qu’il séduit par sa spectaculaire débauche de moyens et un souci constant d'en mettre plein la vue au spectateur gavé d'effets spéciaux et de décibels anglo-saxons. Sa technique renvoie pourtant à un artisanat et à un système D qui furent à l’origine même du septième art dont il retrouve une certaine puissance d’illusion et de suggestion. Alors que la Grande Guerre bat son plein, chassés par l’offensive allemande de l’été 1914, des gamins fuient leur orphelinat de Picardie afin de tailler leur chemin en direction de la Suisse où ils espèrent trouver la paix. Un périple qui conduira Lucas, Lucien, Luigi et Ludwig à entrevoir les horreurs de ce monde livré aux adultes, à faire des rencontres mémorables, notamment celle de Luce, la cinquième mousquetaire, mais la seule fille des “Lulus”, et à nouer des amitiés parfois sans lendemain. C’est dans les trois premiers volumes du cycle de bande dessinée homonyme de Régis Hautière et Hardoc que Yann Samuell a puisé l’inspiration de son septième film pour le cinéma après un détour prolongé par le petit écran. On y retrouve les qualités qui ont contribué à sa réputation à travers Jeux d’enfants (2003), L’âge de raison (2010) ou Le fantôme de Canterville (2016). Un goût pour l’imaginaire qui passe par un souci affirmé de l’esthétique et une capacité à dépasser les conventions inhérentes au naturalisme dominant.
François Damiens
Bien que son sujet l’assigne par bien des aspects à un public familial, La guerre des Lulus se donne les moyens de ses ambitions en jouant la carte du spectaculaire. D’un contexte historique particulièrement tragique, cette fresque d'une ambleur parfois bluffante tire un Road Movie émaillé de rencontres et de morceaux de bravoure. Avec la complicité d’un joli bataillon de Guest Stars parmi lesquelles Isabelle Carré, Didier Bourdon, François Damiens, Alex Lutz et Ahmed Sylla dans des apparitions qui leur donnent le temps d’exister véritablement en quelques scènes. Yann Samuell réussit par ailleurs à instaurer un équilibre acrobatique entre les relations intimistes qui unissent ses jeunes héros et des séquences particulièrement spectaculaires dont les effets spéciaux ont été réalisés en direct sur le tournage, quitte à être parfois retravaillées en post-production. Autre prouesse : évoquer les horreurs de la guerre dans le cadre d’un spectacle à l’usage du jeune public, sans édulcorer la barbarie à visage humain ni faire assaut de violence gratuite. Un tour de force qui passe par le tempérament visionnaire du metteur en scène et l’attention particulière qu’il accorde à ses jeunes interprètes dont la justesse séduit sans une once de cabotinage. C’est précisément parce qu’il maîtrise les moindres aspects de la mise en scène, en se gardant de jouer l’épate, que Yann Samuel transcende son sujet pour en tirer une fable universelle dont seul le succès public décidera d’une suite éventuelle située quant à elle dans un contexte historique apaisé, si l'on se réfère à la bande dessinée originelle.
Jean-Philippe Guerand
Loup Pinard, Mathys Gros et Tom Castaing
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