Asada-ke ! Film japonais de Ryôta Nakano (2020), avec Kazunari Ninomiya, Haru Kuroki, Satoshi Tsumabuki, Jun Fubuki, Mitsuru Hirata, Masaki Suda, Tsubasa Nakagawa, Maho Nonami, Makiko Watanabe, Yukiya Kitamura… 2h07. Sortie le 25 janvier 2023.
Mitsuru Hirata, Satoshi Tsumabuki
Jun Fubuki et Kazunari Ninomiya
Chez ces gens-là, c’est comme entre les trois mousquetaires : un pour tous et tous pour un. Dans la famille Asada, si vous avez demandé la mère, elle se s’imaginait en épouse de yakuza ; le père, lui, aurait aimé être pompier ; quant au frère aîné, il se serait bien vu en pilote de formule 1. Seul le cadet de cette tribu unie mais dysfonctionnelle est parvenu à aller au bout de ses rêves, en devenant photographe et en immortalisant sa tribu hors du commun, mais aussi son quotidien le plus immédiat. C’est en puisant son inspiration dans deux albums du photographe Masashi Asada que Ryôta Nakano est parvenu à signer un portrait de groupe d’une humanité saisissante qui nous montre une facette méconnue de la société japonaise en évoquant un traumatisme récent : les ravages provoqués par le tsunami qui a dévasté l’Est du pays en 2011. Dès lors, la comédie ne bascule pas dans la tragédie, mais distille d’intenses bouffées d’émotion, notamment à travers la quête d’éventuels survivants par des rescapés dont la détresse s’affiche sur des panneaux tapissés d’avis de recherche. Comme autant de bouteilles à la mer qui dérivent vers l’inconnu.
La famille Asada évite la solennité qu’aurait pu susciter son contexte pour se concentrer sur une galerie de personnages que leur bonne humeur et une certaine part d’inconscience semblent protéger de l’adversité. Au-delà de la bonne humeur qui le baigne, le film propose aussi une réflexion sur le pouvoir magique de la photographie quand il s’agit de fixer un moment éphémère voire d’arrêter le temps. Une puissance qui prend une signification particulière lorsqu’il s’agit d’invoquer les morts ou de se remémorer des moments ou des lieux disparus à jamais. Tel est la mission que s’est assigné Masashi Asada à l’épreuve d’une catastrophe naturelle qui a donné une valeur ajoutée à l’image des disparus en apportant un authentique réconfort aux survivants. Un message universel que délivre ce film, sans jamais exploiter les ressources du mélodrame. Si émotion il y a, et elle est ici profonde et sincère, ce n’est jamais dans le but d’apitoyer mais plutôt de compatir avec une grande dignité. À l’instar de ces bénévoles qui s’épuisent à nettoyer les photos qu’ils ramassent afin de rendre leur dignité à des inconnus, en espérant que des proches viennent à croiser leurs visages et y trouver un maigre réconfort. N’est-ce pas là également l’une des vertus cardinales du cinéma que de suspendre ainsi le temps aux yeux de la postérité ?
Jean-Philippe Guerand
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