Rabiye Kurnaz gegen George W. Bush Film germano-français d’Andreas Dresen (2022), avec Meltem Kaptan, Alexander Scheer, Charly Hübner, Nazmi Kirik, Sevda Polat, Abdullah Emre Oztürk, Safak Sengül, Jeanette Spassova, Abak Safaei-Rad, Alexander Hörbe… 1h59. Sortie le 21 décembre 2022.
Meltem Kaptan
Arrêté à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et envoyé dans le camp de Guantánamo pour suspicion de terrorisme, le citoyen allemand d’origine turque Murat Kurnaz attend un jugement hypothétique, tandis que sa mère remue ciel et terre pour obtenir sa libération. Au point d’interpeller le Président des États-Unis en personne, George W. Bush. De cette histoire authentique portée par une personnalité hors du commun qui oppose son bon sens, son amour maternel et sa bonne humeur à la raison d’état d’une grande puissance bureaucratique, le réalisateur allemand Andreas Dresen tire une comédie transcendée par l’interprète du rôle-titre, Meltem Kaptan, connue parmi la communauté turque d’Allemagne comme actrice de stand-up. Cette nature volcanique confère à un sujet a priori tragique le ton de la fable morale. C’est l’éternelle lutte du pot de fer contre le pot de terre, à travers la confrontation d’une femme qui invoque la simple vertu du bon sens pour sauver son fils des griffes d’une justice d’exception. Un scénario brillamment mis en forme par Laila Steiler, la complice du réalisateur sur sept de ses films, à partir du livre autobiographique écrit par celui qui a été victime de cette justice d’exception, mais raconté du point de vue de sa mère.
Alexander Scheer et Meltem Kaptan
Tout l’intérêt de Rabiye Kurnaz contre George W. Bush réside dans le parti d’en rire qu’adopte Dresen en s’attachant à cette femme pétrie de bons sentiments dont la détermination à toute épreuve semble capable de remuer des montagnes pour parvenir à ses fins. D’un sujet particulièrement tragique, il tire une comédie de mœurs souvent désopilante où une femme pétrie de bonnes intentions mène une croisade a priori impossible contre une administration coupable d’avoir appliqué des lois d’exception à de simples suspects détenus dans une zone de non-droit sur des critères parfaitement arbitraires. La réussite du film repose sur son mélange des genres. D’un sujet a priori tragique, il tire une pure comédie de mœurs qu’on peut interpréter comme un simple éloge du bon sens, à travers le tandem burlesque qu’elle vient à former avec son avocat un rien coincé. Une union qui fait la force de ce film incisif capable de déclencher l’hilarité à partir de situations parfois dramatiques. À l’instar de la nature incroyablement enjouée de son personnage principal, capable de soulever des montagnes grâce à un bon sens chevillé au corps. Quitte à aller jusqu’au Président des États-Unis afin d’obtenir gain de cause et sauver ce qu’elle a de plus cher au monde. Un bien joli conte moral.
Jean-Philippe Guerand
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