Documentaire italien de Gianfranco Rosi (2022), avec Jorge Mario Bergoglio. 1h20. Sortie le 14 décembre 2022.
Le Pape François
Est-ce en raison de sa proximité immédiate avec Dieu dont il est le représentant sur terre pour tous les catholiques ? Le souverain pontife occupe une fonction propice à tous les fantasmes, ainsi que l’ont démontré récemment encore la mini-série de Paolo Sorrentino “The Young Pope” (2016) dans laquelle Jude Law campait le premier dignitaire américain du genre, et Les deux papes (2019) où le réalisateur brésilien Fernando Meirelles imaginait un dialogue imaginaire entre le retraité Benoît XIII et son successeur François pour tenter de sauver l’Église catholique toute entière. Ce dernier se trouve aujourd’hui au cœur d’un documentaire que le cinéaste italien Gianfranco Rosi a consacré aux voyages incessants de ce serviteur infatigable de Dieu, en utilisant des images que les télévisions n’ont pour l’essentiel jamais diffusées, sinon peut-être dans les pays visités par ce globe-trotter insatiable qui n’a jamais hésité à prendre des risques pour se montrer à la hauteur de ses fonctions suprêmes. Une démarche singulière et respectueuse qui constitue le pendant du film que lui a consacré Wim Wenders sur un registre très différent : Le pape François : un homme de parole (2018). Comme les deux faces d’une même pièce à l’effigie de l’argentin Jorge Mario Bergoglio, gardien du temple confronté à la plus grave crise de son histoire, entre scandales de pédophilie à répétition et crise de foi endémique qui menacent ses fondations mêmes.
Le Pape François
Ce portrait impressionniste du pape en pèlerin en dit beaucoup sur le dévouement infatigable de ce messager qui va parfois au bout de ses forces pour colporter la bonne parole auprès des catholiques du monde entier. La puissance du film que lui consacre Gianfranco Rosi repose sur son œil acéré et son absence déterminée de commentaires. Il choisit toutefois d’ouvrir son film par un discours dans lequel le Saint Père évoque sa vision et esquisse en quelque sorte sa doctrine. Dès lors, le film nous propose des images de ses multiples voyages effectués, de Lampedusa en 2013 au Canada en 2022, et de sa proximité délibérée avec les populations auxquelles il rend visite, parfois dans des contrées lointaines où la communauté catholique n’est pas la plus nombreuse. La qualité essentielle de ce film est inhérente à son réalisateur qui se garde soigneusement d’orienter notre regard en nous montrant ce que les reportages télévisés ne font qu’esquisser. Le dévouement jusqu’à l’épuisement d’un messager de Dieu qui va à la rencontre des plus modestes en satisfaisant parfois la vanité des autoproclamés grands de ce monde et joue ainsi un rôle géopolitique déterminant, tout en s’attachant à nettoyer les écuries d’Augias au sein d’une église catholique en perte d’influence dans les pays développés dont de multiples affaires de moralité n’ont contribué qu’à saper le prestige. Loin de toute polémique, ce portrait impressionniste décrit aussi simplement que possible le dévouement d’un homme de Dieu conscient de la tâche écrasante qui lui iincombe.
Jean-Philippe Guerand
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