Documentaire français de Marie Perennès et Simon Depardon (2022), avec la voix de Marina Foïs 1h27. Sortie le 9 novembre 2022.
Depuis quelques années, sont apparus sur les murs des grandes villes françaises des sortes de dazibaos peints en noir sur blanc qui dénoncent les innombrables atteintes perpétrées contre les femmes dans une totale impunité. Des slogans percutants et des dénonciations imagées qui ont jeté à la face des passants des agressions jusqu’alors banalisées sinon étouffées. Marie Perennès et Simon Depardon ont décidé de sillonner les rues pour aller à la rencontre des militantes qui expriment leur colère nuitamment afin de dénoncer une coupable banalisation du mal dont les médias ne rendent jamais compte. Une véritable croisade cinématographique indissociable du mouvement #MeToo dont l’objectif n’est pas de monter un sexe contre l’autre, mais plutôt de sensibiliser la population à une vérité qui dérange, mais ne semble pas susciter véritablement de prise de conscience collective. La banalisation des féminicides, viols, harcèlement de rue et autres agressions sexuelles ne se pérennise que parce qu’elle est entourée d’une épaisse chappe de silence. C’est ce qu’ont parfaitement compris ces jeunes femmes bien décidées à s’élever contre ce qui n’est pas une fatalité, en s’emparant de cette parole qu’on ne leur accorde presque jamais pour donner une réalité à ce qui est devenu ni plus ni moins qu’un facteur majeur d’incompréhension entre les sexes dans une société déjà fracturée de toutes parts.
Riposte féministe s’attache à la prise de parole, sinon de pouvoir, d’une nouvelle génération qui a choisi d’exister à travers les mots qu’elle affiche noir sur blanc à même les murs des villes pour dénoncer des atteintes sexistes inadmissibles que la presse ne rapporte même plus, tant leur banalisation les a invisibilisées. Une juste cause qui entend attirer l’attention des passants et les sensibiliser à une situation qui se perpétue sans que quiconque ne semble s’en émouvoir outre mesure. C’est la voix de Marina Foïs qui nous guide parmi ces militantes déterminées à faire changer le monde, en sensibilisant la population à des atteintes devenues endémiques qui sont tout sauf une fatalité irrémédiable et à briser un silence devenu criminel. La fréquentation de ces collectifs à laquelle nous invite ce documentaire est l’occasion d’aller au-delà des mots et de donner une existence concrète à celle qui les peignent en noir sur des calicots pour alerter la population sur une situation qui n’a que trop duré, mais n’est en aucun cas sans issue. C’est toute la noblesse de ce témoignage précieux de matérialiser à l’écran des actions d’éclat vouées à être éphémères que la postérité considèrera sans doute comme un témoignage précieux sur un mouvement de société beaucoup plus vaste, mais jusqu’alors considéré comme clandestin.
Jean-Philippe Guerand
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