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“L’innocent” de Louis Garrel



Film français de Louis Garrel (2022), avec Roschdy Zem, Anouk Grinberg, Noémie Merlant, Louis Garrel, Jean-Claude Pautot, Souleymane Touré, Manda Touré, Léa Wiazemsky, Yanisse Kebbab, Florent Masarin… 1h39. Sortie le 12 octobre 2022.



Louis Garrel et Noémie Merlant



De son grand-père Maurice, Louis Garrel a suivi la voie en tant qu’acteur. De son père Philippe, enfant prodigue du septième art qui a signé son premier long métrage à l’âge de 20 ans, dans l’euphorie de Mai 68, il a hérité une boulimie de mise en scène qui s’est déjà concrétisée par quelque quatre longs métrages depuis Les deux amis (2015). Le premier était coécrit par Christophe Honoré, les deux suivants par le regretté Jean-Claude Carrière, le nouveau par l’écrivain Tanguy Viel. Des collaborations multiples et fertiles qui ont assuré à chacun de ses opus une singularité de nature à inspirer le réalisateur autant qu’à stimuler l’acteur et les partenaires qu’il s’est choisi. L’innocent s’attache aux rapports d’un jeune homme avec sa mère lorsque celle-ci épouse sur un coup de tête un homme qu'elle a rencontré en prison. Rendu méfiant par ce qu’il considère comme un caprice inconsidéré, le fils se résout sans résistance excessive à devenir complice de son nouveau beau-père, au propre comme au figuré. Mais ses motivations ne sont pas exclusivement sentimentales… Comme souvent chez Louis Garrel, l’intrigue n’est qu’un prétexte à trousser des séquences parfois burlesques, souvent tendres, rarement tragiques et surtout à organiser de savoureuses confrontations entre des comédiens complices.



Anouk Grinberg, Roschdy Zem et Louis Garrel



L’innocent est indissociable de ses interprètes parmi lesquels Louis Garrel dans le rôle-titre, mais aussi Anouk Grinberg qui poursuit son retour canon dans l’emploi de cette fleuriste fantasque qui succède à la juge d’instruction de La nuit du 12, à l’habilleuse des Volets verts et prélude à sa composition attendue en Coco Chanel dans la série espagnole “Balenciaga”. Face à elle dans ce rôle de femme-enfant qui sourit à la vie, Roschdy Zem campe une canaille d’anthologie, un voyou à l’ancienne dont on ne peut qu’admirer l’abattage désarmant. Comme une résurrection au goût du jour de ces caïds qu’incarnèrent dans les années 50 à 70 des natures comme Raymond Pellegrin, Michel Constantin ou Lino Ventura dont la stature suffisait à en imposer à leurs adversaires comme à leurs complices. Avec en contraste, la fausse candeur du blanc-bec qu’interprète Louis Garrel. Le plus grand charme de cette comédie virevoltante réside dans le pur plaisir que donnent généreusement à partager ses acteurs, sans calcul ni artifices inutiles. Avec en prime un sourire qui reste inscrit sur le visage du spectateur ravi de passer un moment aussi agréable en si joyeuse compagnie. Voici un pur plaisir d’acteurs à savourer sans modération.

Jean-Philippe Guerand







Louis Garrel, Roschdy Zem et Noémie Merlant

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