Film belgo-franco-hollandais de Lukas Dhont (2022), avec Eden Dambrine, Gustav de Waele, Émilie Dequenne, Léa Drucker, Igor van Dessel, Kevin Janssens, Marc Weiss, Léon Bataille… 1h45. Sortie le 1er novembre 2022.
Gustav de Waele et Eden Dambrine
Deux adolescents partagent une amitié fusionnelle qui suscite des réactions passionnées parmi leur entourage. Là où leurs familles et leurs amis s’en émerveillent, certains de leurs camarades de classe se montrent parfois moins bienveillants. Jusqu’au jour où cette bulle préservée éclate, en semant son lot de chagrin, de douleur et de dommages collatéraux. En révéler davantage serait gâcher le frêle équilibre sur lequel repose Close. Révélé par son premier long métrage, Girl, une subtile exploration de l’identité sexuelle à l’âge des possibles, le réalisateur belge Lukas Dhont poursuit son exploration de la différence au sein d’une société qui la tolère de moins en moins, sous couvert d’une illusoire liberté des mœurs. Il s’attache cette fois à ce moment délicat de l’existence, à l’orée de l’adolescence, où l’innocence des premiers émois entraîne une scission irrémédiable et souvent bouleversante entre l’amitié et l’amour. Un sujet ô combien délicat qui bénéficie d’un traitement d’une infinie subtilité de la part d’un cinéaste passé maître dans l’art d’aborder des sujets éminemment complexes en adoptant en permanence la distance la plus pertinente. Un tour de force qui lui a valu d’ajouter à la Caméra d’or de son premier film le Grand Prix du Festival de Cannes et de compter désormais parmi les plus fins observateurs de notre époque.
Eden Dambrine et Émilie Dequenne
Close est une fusée émotionnelle à deux étages. Le premier s’attache au temps de l’innocence dans une ambiance solaire qui sied au bonheur et à l’insouciance. Il y a dans cette mise en scène de la félicité une communion des humains avec la nature qui évoque irrésistiblement certains morceaux de bravoure du cinéma de Terrence Malick. Ce moment de grâce est indissociable de ses deux jeunes interprètes, le blond Eden Dambrine et le brun Gustav de Waele, filmés avec grâce dans un décor champêtre qui évoque à dessein le paradis terrestre avec ses champs de blé dorés et ses arbres fruitiers généreux. Le second est celui du deuil et de la reconstruction. Là, la présence des adultes s’impose comme une nécessité en la personne des mères qu’incarnent Léa Drucker, dans un emploi ingrat tout en retenue et en non-dits, et surtout Émilie Dequenne qui excelle sur le registre de l’émotion et ajoute un nouveau personnage pétri d’empathie à une série de compositions déjà prodigieuse. Grâce à son tact infini, Lukas Dhont parvient à exprimer des sentiments d’une extrême complexité, en rendant son propos intelligible pour un public rarement concerné par ce type de cinéma. Ici intervient cette délicatesse unique qui lui permet de dire l’indicible en confiant à de jeunes interprètes des personnages d’une rare intensité émotionnelle. Il émane de cette tragédie moderne une grâce magnifique qui emporte tout sur son passage et laisse des traces indélébiles longtemps après son générique de fin.
Jean-Philippe Guerand
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