Documentaire français de Laetitia Møller (2020), avec Stanislas Caumont, Yohann Goetzmann, Aurélien Lobjoit, Kevin Vaquero, Claire Ottaway, Christophe L’Huillier, Eric Dubessay… 1h10. Sortie le 14 septembre 2022.
Stanislas, Yohann, Aurélien et Kevin sont les chanteurs d’Astéréotypie, un groupe de rock pour le moins atypique qui compte par ailleurs quatre musiciens dont le bassiste Arthur B. Gillette et le batteur Eric Taffany, des transfuges du groupe Moriarty. Sur scène, ils se donnent entièrement à leur passion et déchaînent une frénésie communicative. Ces jeunes gens possèdent pourtant un secret : ils sont autistes et se sont rencontrés au sein d’un atelier éducatif dans le cadre de l’institut médico-éducatif Alternance de Bourg-la-Reine, sous la houlette d’un éducateur qui a abordé la musique comme une authentique thérapie alternative. Il suffit dès lors de les voir se déchaîner sur scène pour comprendre l’efficacité de ce traitement de choc qui repose à la fois sur la fameuse frénésie que déploient les membres du groupe en concert et sur les réactions qu’ils suscitent de la part de leur public, à la fois par leurs paroles parfois proches du surréalisme et leur musique trépidante, lesquelles se démarquent des conventions en usage dans ce domaine. Une alchimie qui s’inscrit dans la continuité de l’écriture automatique si chère aux surréalistes. C’est ce déferlement communicatif et cette présence miraculeuse dont a souhaité témoigner la réalisatrice Laetitia Møller dans L’énergie positive des dieux, un film de concert qui va bien au-delà des conventions traditionnelles du genre pour devenir une expérience humaine hors du commun.
Pour s’être rapprochée pas à pas du groupe Astéréotypie depuis 2015, la réalisatrice a noué des relations privilégiées avec ses huit membres et leur ange gardien en choisissant de s’en remettre à son instinct pour témoigner de l‘énergie exceptionnelle qui les habite. Quitte à s’effacer pour mieux les observer. Il émane de son film une rage peu commune, par ailleurs indissociable de la générosité de ces chanteurs habités par des textes souvent singuliers qui témoignent d’une poésie vraiment hors normes où les règles élémentaires de la syntaxe et de la sémantique ne s’appliquent plus. Ce documentaire rock témoigne de la liberté de ses protagonistes et de leur complicité avec une cinéaste qui exalte leur formidable présence, comme a pu le faire naguère le pionnier américain D. A. Pennebaker en immortalisant Jimi Hendrix, David Bowie ou Bob Dylan. L’énergie positive des dieux nous invite à une expérience aussi atypique que ses interprètes et nous entraîne dans un voyage au cœur d’un monde parallèle où tout semble encore possible. À l’image de ce qu’était le rock à ses débuts et de ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être, sous l’influence néfaste des marchands du temple. Comme un salutaire retour aux origines qui déborde de rage et de poésie brute…
Jean-Philippe Guerand
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