Film français de Murielle Magellan (2022), avec Sara Giraudeau, Pierre Deladonchamps, Grégoire Ludig, Sarah Suco, Stéphane Guillon, Thomas Chabrol, Lola Dubini, Djanis Bouzyani, Doully, Saadia Bentaïeb, Denis Mpunga… 1h40. Sortie le 31 août 2022.
Sara Giraudeau
Une jeune femme en proie à une amnésie aussi soudaine qu’inexplicable se retrouve contrainte de ramasser un à un les morceaux épars de son existence, en se fiant à son intime conviction et à un entourage dont rien ne lui garantit qu’il soit réellement le sien. De cette idée traitée en bande dessinée par Boulet et Pénélope Bagieu, Murielle Magellan tire un premier film de cinéma (après le téléfilm “Moi, grosse”, en 2019) aussi modeste qu’attachant. Déjà à l’origine de la série à succès “Les petits meurtres d’Agatha Christie”, la romancière offre pour cela un rôle particulièrement riche à Sara Giraudeau qui passe par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, en essayant de se retrouver dans le regard parfois trompeur des autres. Tout l’intérêt de cette comédie existentielle alerte repose sur le décalage qui s’instaure entre une situation tragique et le parti inattendu qu’en tire celle qui en est victime lorsqu’elle découvre les possibilités aussi surprenantes qu'infinies que lui offre ce nouveau départ, sur le thème “on efface tout et on recommence”. Pour avoir déjà inspiré Joséphine (2013), Joséphine s’arrondit (2016) et la série “Culottée”, Pénélope Bagieu a démontré combien ses portraits de femmes collent à notre époque. Cette nouvelle adaptation le confirme en beauté.
Pierre Deladonchamps et Sara Giraudeau
L’amnésie est un thème cher au film noir où elle a inspiré maintes variations dramatiques, de La maison du docteur Edwardes (1945) d’Alfred Hitchcock à Memento (2000) de Christopher Nolan. Le jeu de pistes que nous propose Murielle Magellan est d’un tout autre ordre par sa fantaisie résolue et son insouciance trompeuse. C’est là où intervient la personnalité de Sara Giraudeau qui ne subit pas cet impondérable comme une malédiction, mais plutôt comme une chance inespérée de repartir vers un autre avenir, sans doute plus conforme à ses vœux. Avec le concours de ce prince charmant qu’incarne Pierre Deladonchamps en amoureux transi toujours prêt à rendre service. La singularité de La page blanche consiste à envisager la perte de mémoire, non pas comme une fatalité, mais comme une opportunité de donner un sacré coup de pouce au destin, en s’offrant en prime une nouvelle vie meilleure que celle dont on a tout oublié. Une réflexion au fond beaucoup plus profonde qu’il ne pourrait y paraître de prime abord qui élargit le champ des possibles à l’infini, ici avec autant de charme que d’humour.
Jean-Philippe Guerand
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