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“Minions 2 : Il était une fois Gru” de Kyle Balda, Brad Ableson et Jonathan Del Val



Minions : The Rise of Gru Film d'animation américain de Kyle Balda, Brad Ableson et Jonathan Del Val (2020), avec Steve Carell / Gad Elmaleh, Pierre Coffin, Taraji P. Henson / Claudia Tagbo, Jean-Claude Van Damme / Bastian Baker, Russell Brand / Jonathan Cohen, Julie Andrews / Frédérique Cantrel, Alan Arkin / Gérard Darmon… 1h28. Sortie le 6 juillet 2022.





Le domaine de l’animation est décidément celui qui fait le plus bouger les lignes du cinéma traditionnel en investissant des espaces encore vierges et en dénuant de son sens l’adjectif “impossible”. Toujours à la pointe dans ce domaine, le studio parisien Illumination ne cesse d’élever la barre de ses ambitions, sans jamais se reposer véritablement sur ses lauriers. C’est le succès de la trilogie Moi, moche et méchant (2010-2017) qui a engendré son spin-off Les Minions (2015), succès planétaire aujourd’hui suivi de son… prequel. L’occasion pour les grands manitous d’accomplir un retour canon en plein Flower Power pour nous conter l’histoire du futur grand méchant Gru, adolescent frustré qui a compris tous les avantages qu’il pouvait tirer de l’âge ingrat en associant son destin aux méfaits d’un gang de sacrés loustics. Coiffures afro, pantalons à pattes d’éléphant et rythmes disco font souffler sur cette faune interlope un furieux air rétro qui offre une nouvelle jeunesse au futur chef des Minions, cette invincible armada jaune aux caractères bien trempés, à la bonne humeur à toute épreuve et au dévouement un rien béat. L’origine du mal est prétexte ici à une reconstitution grandiose qui tire parti de toutes les possibilités de l’animation moderne sans pour autant s’écarter de son sujet : l’apprentissage de la haine conditionné par une soif d’amour inextinguible.





Minions 2 : Il était une fois Gru nous entraîne dans la tête d’un futur génie du crime qui n’apparaît en fait que comme un sale gosse au physique plutôt ingrat que l’absence d’amour a mené sur le mauvais chemin. Avec en guise de contre-point ces petits êtres jaunes assoiffés d’amour qui jettent leur dévolu sur ce leader à l’origine assez peu charismatique. L’époque disco est reconstituée à la perfection et ce prequel désopilant n’est pas exempt d’une certaine nostalgie qui rejoint bizarrement celle qui baignait récemment un autre film à succès : Licorice Pizza de Paul Thomas Anderson. Comme si l’Amérique était condamnée à exalter son insouciance révolue pour mieux se consoler d’un présent qui prête peu à espérer en un monde meilleur. Ce prequel savoureux s’impose en outre comme un véritable tour de force, en exploitant les ressources les plus insoupçonnées du cinéma d’animation, notamment pour réaliser des plans qui seraient difficilement concevables dans le cadre des moyens dont dispose le cinéma traditionnel. C’est le talent des studios les plus novateurs (dont font partie Illumination, Pixar et Ghibli) que d’exploiter à fond les moindres possibilités d’un domaine qui ne cesse de repousser les limites du réel pour donner de la chair à nos rêves, en transgressant les règles du jeu cinématographique avec une imagination qui s’ingénie à dépasser les bornes.

Jean-Philippe Guerand







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