Film français de Didier Barcelo (2022), avec Marina Foïs, Benjamin Voisin, Jean-Charles Clichet, Albert Delpy, Jean-Pierre Martins, Candice Bouchet, Ariane Mourier, Émilie Arthapignet… 1h29. Sortie le 29 juin 2022.
Benjamin Voisin
Une infirmière un peu fragile se retrouve malgré elle prisonnière de sa voiture dont une crise de panique l’empêche irrépressiblement de sortir pour continuer à vaquer à ses obligations quotidiennes. Condamnée dès lors à rouler jusqu’à la panne d’essence ou à se garer pour prendre son mal en patience et attendre que son inquiétude s’apaise. Manque de chance, c’est le moment que choisit un jeune homme pour voler le véhicule… avec sa propriétaire à bord. Commence alors un Road Movie traditionnel dans lequel ces deux éclopés de la vie entreprennent de faire connaissance et de se rasséréner l’un l’autre. Pour so premier long métrage, Didier Barcelo a choisi une figure imposée du cinéma contemporain qui a le mérite de déployer des moyens modestes donc d’assurer une prise de risques raisonnable en termes de production. Avec à la clé un scénario solide qui s’en remet pour une bonne part aux dialogues, à travers la confrontation de deux comédiens concentrés sur leurs rôles : Marina Foïs, qui alterne les registres sans relâche avec la boulimie d’une Annie Girardot, et Benjamin Voisin, récent César du meilleur espoir masculin pour sa composition de jeune arriviste dans Illusions perdues de Xavier Giannoli.
Marina Foïs et Benjamin Voisin
En roue libre tire tout son intérêt de sa capacité à rebondir à partir d’une situation a priori contraignante en s’ouvrant sur l’extérieur, qu’il s’agisse de rencontres de hasard ou d’intrusions inattendues. Un peu comme si les vitres de la voiture devenaient des fenêtres sur le monde, tout en protégeant ses occupants de ses dangers. Au point de transformer l’habitacle en une sorte de cocon protecteur et même à l’ouvrir vers le ciel dans un acte ô combien symbolique. Le film brille en fait par son mélange étonnant d’audace et de modestie, sans jamais laisser ses aléas phagocyter la rigueur de son postulat de départ et l’empêcher de parvenir à son terme symbolique : une sorte de point de non-retour que représente l’océan où l'on se noie mais l'on se régénère parfois aussi. Dans la grande tradition inhérente au Road Movie en tant que genre, ce sont à la fois le voyage et ses avatars, les rencontres, qui contribuent à faire évoluer ces protagonistes confrontés à des situations qui les dépassent. Dès lors, l’image que ce film sans prétention nous renvoie est à la fois celle de la société actuelle et du fameux monde d’après vers lequel semblait nous entraîner la crise sanitaire, bien que celle-ci ne soit pas vraiment évoquée ici autrement qu’à travers la dépression que traverse le personnage de Marina Foïs. C’est donc bel et bien un miroir à peine déformant que nous tend cette chronique impressionniste.
Jean-Philippe Guerand
Commentaires
Enregistrer un commentaire