Competencia oficial Film hispano-argentin de Gastón Duprat et Mariano Cohn (2021), avec Penélope Cruz, Antonio Banderas, Oscar Martínez, José Luis Gomez, Manolo Sol, Nagore Aramburu, Irene Escolar, Pilar Castro… 1h54. Sortie le 1er juin 2022.
Penélope Cruz
Des films sur le cinéma, ce n’est pas vraiment ce qui manque. Compétition officielle est pourtant d’une nature quelque peu particulière. Un milliardaire fantasque soucieux d’associer son nom à une œuvre artistique immémoriale décide de s’offrir ce qui se fait de mieux dans ce domaine. En l’occurrence, un attelage pour le moins baroque qui associe une réalisatrice “arty” aussi excentrique qu’illuminée à deux acteurs que tout semble opposer : l’un est une star qui a vendu son âme au diable hollywoodien, l’autre une pure légende du théâtre rompue aux tirades interminables et grandiloquentes qui considère le cinéma comme un vulgaire pis-aller. Le tandem argentin formé par Mariano Cohn et Gastón Duprat explore un aspect de la fabrication d’un film auquel le cinéma s’est rarement attaché, lequel passe en outre ici par la confrontation de trois egos surdimensionnés, sans caméra pour les trahir. Les réalisateurs du déjà fort réussi Un coup de maître excellent à décrire la gestation tortueuse d’un projet qui fédère des talents authentiques, mais pas nécessairement compatibles, autour d’une cause qui n’apparaît en fait que comme un prétexte.
Compétition officielle repose à la fois sur un scénario extrêmement bien vissé et un trio de comédiens dont la complicité crève l’écran, même si chacun joue sa partition avec son abattage habituel et que la mise en scène joue avec virtuosité de ces confrontations de caractères virevoltantes. La complicité de Penélope Cruz et Antonio Banderas doit ainsi beaucoup à leur association préalable sous la houlette de Pedro Almodóvar dans Les amants passagers (2013) et Douleur et gloire (2019). Dès lors, c’est elle qui cimente les relations de l’une et de l’autre avec leur partenaire argentin, Oscar Martínez, conférant à leurs échanges un élan supplémentaire en s’appuyant sur leur connivence supposée. Les acteurs prennent en outre soin de charger leurs personnages, Penélope Cruz à l’aide d’une chevelure rousse à la Raiponce, Antonio Banderas en jouant les abrutis avec une troublante conviction et Oscar Martínez dans la stature du commandeur qui s’abaisse à jouer pour le cinéma malgré le mépris souverain qu’il lui voue. Mariano Cohn et Gastón Duprat orchestrent cette sarabande des pantins avec une jubilation communicative, sans jamais se montrer dupes du jeu de rôles qui la conditionne. Avec à la clé une mise en boîte qui distille un grand plaisir partagé.
Jean-Philippe Guerand
Commentaires
Enregistrer un commentaire