Film australien de Justin Kurzel (2021), avec Caleb Landry Jones, Essie Davis, Anthony La Paglia, Judy Davis, Phoebe Taylor, Sean Keenan, Conrad Brandt, Jessie Ward, Annabel Marshall-Roth… 1h50. Sortie le 11 mai 2022.
Caleb Landry Jones et Essie Davis
Alors qu’il étouffe chez ses parents, Nitram trouve un emploi de jardinier chez une femme avec laquelle il décide de s’installer. Jusqu’au moment où un enchaînement de circonstances va déstabiliser le jeune homme et le pousser à commettre un geste irréparable… Ce personnage asocial est indissociable de son interprète, le musicien texan Caleb Landry Jones, lauréat du Prix d’interprétation masculine au dernier Festival de Cannes pour sa composition hallucinante que sert son physique inquiétant. Sa mère est campée quant à elle par l’une des actrices les plus chevronnées du cinéma australien, Judy Davis. Le réalisateur Justin Kurzel revient quant à lui dix ans après à l’âpreté qui caractérisait son premier film, Les crimes de Snowtown, en s’attachant à la lente dérive d’un marginal que la société va pousser à l’irréparable. La mise en scène fonctionne en cela comme une mécanique de précision en montrant les effets pervers que peut provoquer la mise à l’écart d’un individu en proie à un milieu toxique. Avec un ancrage final qui donne une autre perspective à cette dérive désespérée.
Caleb Landry Jones
Nitram repose en quelque sorte sur l’observation clinique d’un psychopathe qui devient rebelle sans cause véritable, sous l’effet d’une accumulation de vexations et d’humiliations infimes. Un thème qui semble hanter son réalisateur au point de l’avoir déjà abordé dans la plupart de ses films, au fil de variations qui vont d’une adaptation du Macbeth de William Shakespeare au jeu vidéo Assassin’s Creed et à une évocation du fameux Gang Kelly qui a inspiré une demi-douzaine de films. Une œuvre d’une grande cohérence qui emprunte des voies multiples pour dessiner les contours d’une société australienne propice aux pires excès dont le cinéma s’est bien souvent fait l’écho. Justin Kurzel n’éprouve visiblement pas beaucoup d’empathie pour son protagoniste, même s’il le montre otage d’une aliénation qui va le conditionner à exprimer son mal de vivre en se dressant contre la société coupable de l’avoir marginalisé et en le poussant à commettre l’irréparable afin d’exister au moins une fois dans sa vie à travers le regard des autres, aussi hostile puisse-t-il être.
Jean-Philippe Guerand
Commentaires
Enregistrer un commentaire