Film français de Paul Vecchiali (2022), avec Ugo Broussot, Mona Heftre, Franck Libert, Benjamin Barclay, Marilyn Lattard, Jérôme Soubeyrand, Adriana Lucq, Julien Lucq, Geneviève Montaigu, Pierre Sénélas… 1h29. Sortie le 27 avril 2022.
Jérôme Soubeyrand
Infatigable Paul Vecchiali qui célèbre ses soixante de carrière à 92 ans, en s’attachant aux remous suscités par l’ouverture d’un cabaret gay à proximité de Ramatuelle auprès d’une frange d’autochtones aussi puritains qu’homophobes. Une comédie des apparences narquoise et désabusée qui utilise ce microcosme provincial comme une projection en miniature de la société française actuelle, tiraillée entre ses paradoxes insoutenables et ses déchirements sociétaux. Certains y verront une dénonciation courageuse de l’extrême-droite la plus réactionnaire et de son hypocrisie traditionnelle face à l’évolution des mœurs. Démocrate pur et dur, Paul Vecchiali a signé naguère avec La machine (1977) l’un des premiers réquisitoires cinématographiques contre la peine de mort, à une époque où l’opinion publique la soutenait encore majoritairement. Quarante-cinq ans plus tard, le réalisateur n’a rien perdu de sa virulence. C’est la société qui a évolué. Il est toutefois difficile de ne pas être touché par sa conviction, même si ce n’est plus vraiment de la hargne, malgré un dénouement tragique qui reflète davantage de bêtise que de franche méchanceté.
On ne peut que saluer la ténacité de Paul Vecchiali qui s’offre au passage quelques jolis intermèdes musicaux, en célébrant sa nostalgie d’enfant du cinéma des années 30, déjà apparente dans plusieurs de ses films dont l’incontournable En haut des marches (1983), avec la complicité indéfectible de son alter ego compositeur Roland Vincent, lui-même octogénaire. Certes, Pas… de quartier peut sembler désuet par certains aspects. Mais pour avoir grandi à Toulon, l’enfant du pays ne désarme pas et attaque frontalement cet état d’esprit rance qui règne dans certaines bourgades méridionales, là même où le Front National de Jean-Marie Le Pen remporta naguère ses premiers succès électoraux. C’est cet état d’esprit d’un autre âge que stigmatise Pas… de quartier avec davantage de bonhomie que d’acrimonie, mais toutefois quelques répliques bien senties de la part d’un cinéaste généreux auquel l’âge n’a pas ôté sa détermination ni sa pugnacité. Il suffit de voir la façon dont il met en scène un conseil municipal pour le vérifier. Chez lui, c’est toujours la chaleur humaine qui finit par prendre l’ascendant sur les bas instincts.
Jean-Philippe Guerand
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