Film français de Pascal Tagnati (2021), avec Jean-Christophe Folly, Pascal Tagnati, Cédric Appietto, Apollonia Bronchain Orsoni, Jeremy Alberti, Davia Benedetti, Joseph Castelliti, Roselyne de Nobili, Maryse Miège… 2h07. Sortie le 20 avril 2022.
Un village corse parmi tant d’autres. Les habitants y vaquent à leur vie quotidienne et constituent des groupes au sein desquels s’affirment quelques identités plus fortes. Pour son premier long métrage, Pascal Tagnati a choisi le ton de la chronique et découpé son film sous forme de plans séquences. Il nous entraîne ainsi d’une communauté à l’autre, en nous familiarisant peu à peu avec les habitants de ce village dont les jours et les nuits sont rythmés par des rituels intangibles. Le temps des vacances, ce beau tableau de mœurs délibérément contemplatif nous entraîne parmi une population estivale où se mêlent les autochtones, les Corses du continent, mais aussi ceux de la ville de retour au pays et les touristes venus chercher là un certain dépaysement. La mise en scène revendique un certain impressionnisme qui mêle un regard documentaire et des personnages de pure fiction immergés parmi la population locale, sans qu’il s’avère possible de distinguer les uns des autres de façon certaine. C’est la somme de ces portraits individuels qui finit par conférer un rare supplément d’âme à cette communauté dont le film nous dévoile peu à peu les rapports compliqués.
I comete (littéralement “les comètes”) est une expérience de cinéma intense qui repose sur un enchaînement de plans séquences ordonnés autour de fragments de la vie quotidienne. Ces scènes, Pascal Tagnati les organise peu à peu comme les pièces d’un puzzle qui vont s’assembler et assigner à chacun son rôle social au sein de cette communauté, du caïd black à la vieille dame veillée par une bonne âme, en passant par cette nymphe qui s’exhibe alanguie au bord d’une rivière et dont on ne découvrira que plus tard le contre-champ. La mise en scène transcende la banalité apparente de ce sujet que son auteur aime à décrire comme un chant traditionnel funèbre. La Corse que dépeint ce film est un paysage de carte postale ponctué par des rites séculaires et l’usage alternatif d’une langue utilisée comme un rempart hermétique, où la violence, l’indépendantisme et la politique n’ont pas leur place, sinon à un échelon minuscule. La caméra se tient souvent à distance et ne bouge que très peu. La mise en scène semble reposer sur une constatation : c’est de la réalité la plus quotidienne que naissent le drame, la tragédie voire la comédie. Dans ce monde inondé de soleil, tout est possible. Y compris qu’une gamine haute comme trois pommes use d’un langage de charretier pour humilier une intruse et lui signifier qu’elle n’a pas sa place dans ce monde clos. Ici, la promesse de cinéma s’avère souvent plus forte que la pâte humaine qui l’anime. C’est même toute la grâce de ce portrait de groupe.
Jean-Philippe Guerand
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