De uskyldige Film norvégo-suédo-dano-britanno-franco-finlandais d’Eskil Vogt (2021), avec Rakel Lenora Fløttum, Alva Brynsmo Ramstad, Sam Ashraf, Mina Yasmin Bremseth Asheim, Morten Svartveit, Kadra Yusuf, Lisa Tønne, Irina Eidsvold Tøien… 1h57. Sortie le 9 février 2022.
Rakel Lenora Fløttum
Une longue tradition du cinéma fantastique veut que les enfants soient parfois décrits comme de petits êtres malfaisants animés de très mauvaises intentions que dissimulent leurs visages d’anges. C’est le postulat de The Innocents qui s’inscrit dans la meilleure lignée du genre, en balayant tout angélisme par principe. Ses jeunes protagonistes tiennent à la fois de ceux du Village des damnés (1960) de Wolf Rilla par leurs pouvoirs maléfiques et de ceux des Innocents (1961) inspiré à Jack Clayton par “Le tour d’écrou” de l’écrivain américain Henry James. On leur donnerait volontiers le Bon Dieu sans confession, s’ils n’étaient habités d’une force surnaturelle qu’ils emploient à mauvais escient avec une solidarité d’autant plus redoutable qu’elle vise les adultes. Derrière ce film inscrit parmi les grands ensembles plutôt anodins d’une cité norvégienne pendant un été ensoleillé (a contrario des nuits agitées qui baigne traditionnellement l’horreur et le fantastique), se cache un auteur connu en tant que scénariste attitré de son compatriote Joachim Trier avec lequel il a récemment été associé à Julie (en 12 chapitres), sur un tout autre registre, mais aussi auparavant à Thelma (2017) dont la jeune héroïne épileptique était elle aussi en proie à des phénomènes surnaturels.
Rakel Lenora Fløttum
Il s’agit là du deuxième long métrage d’Eskil Vogt après Blind : un rêve éveillé (2014) qui inscrivait déjà dans un environnement urbain la cécité de sa protagoniste comme vecteur d’isolement et de marginalisation. The Innocents est un régal de perversité bien tempérée d’autant plus jubilatoire que son réalisateur s’amuse à souligner le contraste qui existe entre ces gamins si mignons réunis pour des jeux anodins et la tempête qui gronde derrière leurs bouilles angéliques et menace de tout dévaster sur son passage. Avec en prime des effets spéciaux d’une poésie rare qui nous reposent des déluges technologiques hollywoodiens trop souvent utilisés pour colmater des brèches scénaristiques béantes. Rien de cela ici où Vogt se révèle aussi subtil en tant qu’auteur qu’habile metteur en scène, notamment par son utilisation angoissante du son qui a d’ailleurs valu au film un trophée européen justifié dans cette catégorie trop souvent négligée. The Innocents a par ailleurs obtenu plusieurs distinctions méritées parmi lesquelles les prix souvent incompatibles de la critique et du public au festival de Gérardmer, grand-messe française du cinéma fantastique et d’horreur.
Jean-Philippe Guerand
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