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“Petite Solange” d’Axelle Ropert




Film français d’Axelle Ropert (2020), avec Jade Springer, Léa Drucker, Philippe Katerine, Grégoire Montana-Haroche, Chloë Astor, Benjamin Esdraffo, Joanna Grudzinska, Marthe Léon, Léo Ferreira… 1h25. Sortie le 2 février 2022.



Jade Springer et Grégoire Montana-Haroche



Vue à travers les yeux d’une adolescente de 14 ans, la vie des adultes est une énigme bien compliquée à élucider. Solange a toujours considéré ses parents avec admiration et bienveillance. Jusqu’au moment où elle a senti que l’harmonie familiale était en train de succomber à trop de non-dits et de coups de canif dans le contrat de mariage, alors que son frère aîné semble nettement moins concerné et en a pris son parti. Sentant la situation lui échapper et menacer ce cadre harmonieux dans lequel elle a grandi paisiblement, elle va tout tenter pour que son rêve se prolonge, préférant l’illusion d’un bonheur parfait à une mésentente qui la concerne au premier chef et l’atteint dans sa chair. Venue de la critique, Axelle Ropert voue depuis toujours une grande admiration à la Nouvelle Vague en général et à François Truffaut en particulier. Au point d’avoir apporté son tribut personnel il y a quelques années à l’exposition consacrée par la Cinémathèque française à ce dernier, à travers trois modules thématiques. Après plusieurs films trop cérébraux pour être vraiment émouvants, elle fend enfin l’armure avec Petite Solange et laisse s’exprimer ses sentiments à travers une histoire somme toute banale dont on perçoit qu’elle ne la laisse pas indifférente.



Philippe Katerine et Jade Springer



Couronné du Prix Jean Vigo qui a consacré bon nombre de jeunes cinéastes, le plus souvent pour leur premier ou leur deuxième film, Axelle Ropert signe avec Petite Solange ce qui est déjà son cinquième long métrage en quinze ans. L’histoire somme toute banale d’un divorce vue à travers les yeux de sa victime collatérale, elle-même confrontée à un âge qui se caractérise par une certaine hypertrophie des sentiments et une confusion troublante entre amour et amitié. La réussite de ce film simple mais touchant repose pour une bonne part sur la qualité de son casting, à commencer par le couple à fleur de peau formé par Léa Drucker et Philippe Katerine, l’un et l’autre porteurs d’un vécu précieux qui barde leurs personnages de maintes petites écorchures inhérentes à l’âge mûr. Avec face à eux une révélation en la personne de leur “fille” qu’incarne Jade Springer et pour laquelle la réalisatrice dit avoir recherché l’équivalent du Jean-Pierre Léaud des Quatre cents coups ou de Charlotte Gainsbourg dans L’effrontée, « comme un livre ouvert, mais qui reste en partie indéchiffrable ». Mission accomplie pour une tranche de vie qui suscite l’empathie autour d’un thème certes banal, mais ô combien partagé, qui laisse toujours des blessures aussi vives à l'ère des familles recomposées pour ne pas dire décomposées.

Jean-Philippe Guerand





Léa Drucker et Jade Springer

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