Film français d’Aurélie Saada (2021), avec Françoise Fabian, Aure Atika, Grégory Montel, Damien Chapelle, Pascal Elbé, Mehdi Nebbou, Anne Suarez, Delphine Horvilleur, Julia Dumont, Bernard Murat… 1h43. Sortie le 8 décembre 2021.
Rose a vécu toute sa vie dans l’ombre de son mari au sein de la communauté juive orthodoxe, en ménagère soumise et silencieuse. Le jour où son époux vient à trépasser, ses enfants décident de l’entourer, au point de l’étouffer et de l'empêcher de vivre enfin pour elle seule. C’est le moment qu’elle choisit pour goûter enfin aux plaisirs qui lui ont été interdits jusqu’alors, même si ce n’est pas du goût de sa fille et de ses deux fils eux-mêmes confrontés à des situations personnelles pour le moins cahotiques. Décidée à profiter de son veuvage, elle se heurte frontalement aux préjugés de ses proches qui la jugent avant de chercher à la comprendre… Pour son premier film, Aurélie Saada (qui se fit connaître en chantant au sein du duo Brigitte) s’attache à des gens et des situations qui lui sont visiblement familiers avec davantage de tendresse que d’acrimonie. Elle souligne au passage à quel point le temps a peu de prise sur ces communautés prisonnières de leurs traditions coutumières qui ne peuvent vraiment goûter au bonheur que dans la clandestinité et avec une dose d’hypocrisie bien tempérée.
Françoise Fabian
Rose est indissociable de son interprète principale, Françoise Fabian, splendide senior qui s’épanouit comme une fleur trop longtemps conservée dans l’obscurité. La comédienne s’approprie les moindres contradictions de son rôle avec un bonheur rare et jette sur le monde qui l’entoure, et qu’elle découvre pour une bonne part, le regard d’un gamin contemplant la vitrine d’une pâtisserie. Avec cette nuance qu’il n’est jamais trop tard et un discours positif sur les bienfaits de la laïcité partagée. Jamais Aurélie Saada n’adopte la posture de la dénonciatrice, car c’est surtout avec tendresse qu’elle dépeint ce monde à part dont la société française a fini par contraindre les plus jeunes à s’assimiler en douceur, sans renier pour autant ni le judaïsme ni ses traditions ancestrales. La présence de Delphine Horvilleur dans son propre rôle de femme rabbin libérale atteste par ailleurs de cette évolution générationnelle inéluctable. Avec en prime le magnifique portrait de femme mûre campé par une actrice toute en retenue.
Jean-Philippe Guerand
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