The Matrix Resurrections Film américain de de Lana Wachowski (2021), avec Keanu Reeves, Carrie-Anne Moss, Yahya Abdul-Mateen II, Jonathan Groff, Jessica Henwick, Neil Patrick Harris, Jada Pinkett Smith, Priyanka Chopra Jonas, Christina Ricci, Lambert Wilson… 2h28. Sortie le 22 décembre 2021.
Il aura fallu dix-huit ans, soit une génération entière, pour voir renaître de ses cendres la saga de science-fiction apparue à l’orée du troisième millénaire. Matrix (1999), puis Matrix Reloaded (2003) et Matrix Revolutions, tournés simultanément et sortis à quelque mois d’intervalle, ont consacré l’irruption du numérique et intégré l’avènement de la réalité virtuelle dans un cinéma qui n’a cessé de progresser depuis à pas de géants sur le plan technologique. Au point d’étendre l’éventail des possibles à l’infini depuis que James Cameron lui a fait accomplir un nouveau pas de géant avec Avatar et ses suites encore en gestation qui s’annoncent révolutionnaires. C’est donc vivre une expérience particulière que de replonger aujourd’hui parmi l’univers de Matrix. Avec ce corollaire essentiel qui nous vaut de retrouver des personnages qui ont mûri et voient resurgir un passé qu’ils croyaient révolu.
Keanu Reeves et Carrie-Anne Moss
Seule aux commandes, Lana Wachowski signe en fait un film étonnamment nostalgique qui transgresse un dogme hollywoodien fondamental : le vieillissement. Elle s’attarde à dessein sur les rides des visages et la peau des mains de ses deux protagonistes principaux, comme rattrapés par un passé qui est devenu aussi le nôtre. Avec en guise de point d’orgue ce plan ô combien symbolique de Carrie-Anne Moss et Keanu Reeves liés l’un à l’autre pour toujours qui reproduit l’image éternelle de “La création d’Adam” par Michel-Ange, œuvre picturale ô combien allégorique qui enorgueillit le plafond de la chapelle Sixtine, au Vatican, et reste l'un des chefs d’œuvre de la Renaissance.
“La création d’Adam” de Michel-Ange
Matrix Resurrections ressemble à un cadeau offert aux fans de la trilogie dont l’enjeu apparaît purement ludique. Présent d’autant plus symbolique qu’il est réalisé par une seule des sœurs, là où les opus précédents étaient signés par les frères Wachowski avant leur transformation, comme l’entité bicéphale qu’ils constituaient alors. La charge symbolique de cet épilogue tardif est considérable. Le film n’est donc pas à proprement parler la suite des précédents, mais plutôt une sorte de codicille que la dernière image perpétue pour l’éternité. Avec le sourire et une indéniable charge émotionnelle.
Keanu Reeves et Jessica Henwick
Les fans les plus intransigeants pourront s’ébaubir que Laurence Fishburne (Morpheus) et Hugo Weaving (l’agent Smith) aient laissé la place à Yahya Abdul-Mateen II et Jonathan Groff, en s’amusant de voir Jada Pinkett Smith et Lambert Wilson camper les versions senior de leurs personnages de Niobe et du Mérovingien. Mais, là encore, c’est la simple application du concept selon lequel les humains restent mortels, tandis que leurs avatars sont éternels. C’est toute la poésie qui baigne cet opus final (il n’implique aucune suite sinon pour des raisons commerciales que pourrait justifier un triomphe éventuel au box-office), avec en prime une véritable composante romantique assez atypique par rapport aux normes en vigueur dans le cinéma de science-fiction traditionnel. Précisons que les scènes d’action sont tout de même au rendez-vous et toujours aussi bluffantes, sans jamais jouer la carte de la démonstration de force ostentatoire. Les amateurs apprécieront…
Jean-Philippe Guerand
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