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“Les enfants du soleil” de Majid Majidi




Khorshid Film iranien de Majid Majidi (2020), avec Rouhollah Zamani, Ali Nasirian, Javad Ezzati, Tannaz Tabatabaei, Mahdi Mousav, Shamila Shirzad, Abolfazl Shirzad, Mani Ghafouri… 1h39. Sortie le 29 décembre 2021.



Rouhollah Zamani



Majid Majidi a de la suite dans les idées, ainsi que l’atteste sa filmographie dont on a inexplicablement perdu le fil il y a une douzaine d’années, au lendemain du Chant des moineaux, Ours d’or du festival de Berlin en 2008. Ce cinéaste iranien né en 1959 a consacré ses œuvres les plus connues à l’enfance dont Les enfants du ciel (1997), La couleur du paradis (1999) et La pluie (2001) qui lui ont valu à trois reprises le Grand Prix des Amériques du festival de Montréal. Il ajoute aujourd’hui un nouveau chapitre à ce cycle avec Les enfants du soleil, qui a valu le prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune interprète à Rouhollah Zamani lors de la dernière Mostra. Celui-ci y incarne l’aîné d’un quatuor de gamins qui se partagent entre de petits boulots dans un garage et quelques larcins. Jusqu’au moment où un mafieux les engage pour dénicher un trésor enfoui sous le site d’une école dans laquelle ils vont devoir s’inscrire et frayer avec des gamins de leur âge aux destinées plus heureuses.



Rouhollah Zamani



Derrière l’intrigue policière se cache évidemment un second niveau de lecture qui revêt l’apparence de la chronique sociale et n’est pas sans évoquer la démarche d’Asghar Farhadi dans Un héros. Comme son compatriote à qui il a ouvert la voie en étant le premier cinéaste iranien nommé à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère pour Les enfants du ciel, Majid Majidi utilise le prétexte de cette chasse au trésor pour dresser une nouvelle fois le portrait de cette jeunesse livrée à elle-même qui lui a déjà inspiré tant de films aussi justes que touchants. La mise en scène excelle à faire palpiter ses jeunes protagonistes manipulés par des adultes cyniques et confrontés ici à une autre alternative existentielle : rentrer dans le rang du système scolaire pour s’assurer un avenir plus fiable. Pas question pour Majidi de se bercer d’illusions. Même s’il s’autorise un écart vers l’aventure chimiquement la plus pure, lors de la recherche du trésor, la réalité se charge de se rappeler au bon souvenir de ses jeunes anti-héros en les renvoyant à une fatalité sociale endémique qui ne succombe à aucun moment à la tentation du misérabilisme. C’est à ce genre de détails qu’on reconnaît le tact de ce disciple impressionniste de Vittorio de Sica et de Ken Loach.

Jean-Philippe Guerand







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