Film français de Jérôme Bonnell (2020), avec Grégory Montel, Grégory Gadebois, Anaïs Demoustier, Léa Drucker, Nadège Beausson-Diagne, Pablo Pauly, Yumi Narita, Solène Rigot… 1h30. Sortie le 15 décembre 2021.
Grégory Montel et Anaïs Demoustier
Au sortir d’une nuit d’ivresse, Jonas se rend chez son ex-maîtresse avec laquelle il tente maladroitement de renouer. Mais Léa campe sur ses positions et le chasse de chez elle après une ultime étreinte. Loin de se résigner, il décide de s’installer dans le café d’en face où se retrouvent les habitués du quartier, sous le regard bienveillant mais blasé du patron. C’est le début d’une journée pour le moins compliquée. La petite musique de Jérôme Bonnell nous est désormais familière. Elle se répand le plus souvent à partir des événements les plus anodins. En l’occurrence, dans Chère Léa, les élans du cœur se déploient autour d’un couple en rupture et débordent à travers tout un quartier de Paris qui circonscrit l’action pour se transformer en véritable carte du Tendre, mais sans la moindre mièvrerie. À travers cette comédie sentimentale parfois acide, il développe des thèmes qui couraient déjà dans ses films précédents, souvent sur un registre moins léger. À son habitude, l’auteur délicat de J’attends quelqu’un (2007) et du Temps de l’aventure (2013) s’en remet à deux atouts qu’il maîtrise à la perfection : des dialogues très enlevés et des interprètes qui les transcendent avec une gourmandise communicative.
Grégory Montel et Anaïs Demoustier
Autour du couple central impossible formé par Grégory Montel (l’agent ombrageux de la série “Dix pour cent”) et Anaïs Demoustier (que le réalisateur avait déjà dirigée dans À trois on y va, son opus précédent), sur un registre nettement plus grave que dans ses dernières apparitions, le patron de bistro campé avec son autorité naturelle par Grégory Gadebois (que Bonnell a contribué à révéler dans Le chignon d’Olga et Les yeux clairs), le client psychopathe qu’interprète Pablo Pauly ou l’épouse aux abois qu’incarne Léa Drucker le temps d’une scène magnifique. Ce que saisit avec une telle justesse Bonnell, c’est la vie quotidienne d’une grande ville dans laquelle les gens ont fini par se croiser sans se voir et où la multitude n’empêche pas la solitude et l’isolement. Il émane de ce film choral la perpétuation d’une longue tradition qui renvoie au cinéma d’Avant-Guerre, si fertile en seconds rôles et en répliques percutantes, et notamment à l’un de ses maîtres les plus injustement oubliés, René Clair qui fut le premier académicien du cinéma. Un modèle de fantaisie et d’élégance.
Jean-Philippe Guerand
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