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“Storia di vacanze” de Fabio et Damiano d’Innocenzo




Favolacce Film italo-suisse de Fabio et Damiano d’Innocenzo (2020), avec Elio Germano, Barbara Ronchi, Aldo Ottobrino, Barbara Chichiarelli, Gabriel Montesi, Ileana d’Ambra, Max Malatesta… 1h40. Sortie le 13 octobre 2021.






Dans une banlieue pavillonnaire de la banlieue romaine, vivent des familles de bourgeois tout petits qui n’ont pas les moyens de partir en vacances. Alors ils compensent à grands renforts de piscines gonflables et de barbecues entre voisins. Mais leurs enfants n’ont pas nécessairement envie de cette vie de misère qui pèse sur eux comme une fatalité. Alors ils profitent de cette période d’insouciance pour goûter à la liberté. Avec toutes les tentations dangereuses qui vont de pair. Remarqués pour leur contribution au scénario de Dogman de Matteo Garrone et leur premier film en tant que réalisateurs, Frères de sang (2018), une chronique mafieuse dépourvue de complaisance, les frères d’Innocenzo s’attachent cette fois à des parias confits dans leur médiocrité qui vont se trouver dépassés par leur propre progéniture. Ils n’affichent pas la moindre sympathie particulière à l’égard de ces damnés de la terre dépourvus d’ambition qui se complaisent dans leur condition sans rien entreprendre pour y échapper. Alors comme ils n’ont pas vraiment les moyens de partir en vacances, ils en reproduisent l’illusion à domicile en laissant leur progéniture goûter à une liberté illusoire dans ce cadre contraint.



Elio Germano



Il suffit de voir le masque de grossesse d’une future mère en gros plan pour réaliser le peu d’empathie qu’éprouvent les frères d’Innocenzo pour ce microcosme. Ours d’argent du meilleur scénario lors de la Berlinale 2020, puis présenté dans le cadre du festival Reims Polar 2021, Storia di vacanze croise deux traditions majeures du cinéma transalpin, le Néo-Réalisme et la comédie italienne, pour en façonner une troisième qui traite sans aménité d’un ramassis de minables béats qui entraîne le pays vers un populisme lourd de conséquences politiques. Il émane de ce portrait de groupe où les parents font déclamer à la cantonade les bulletins scolaires de leurs enfants une ironie impitoyable qui devient le terreau fertile d’une revanche sociale implacable. Dans cette jungle urbaine auto-satisfaite, Elio Germano incarne un père fier comme un coq qui excelle sur le registre du macho minable piégé par une société de consommation qui fonctionne comme un miroir aux alouettes dérisoire. C’est dire combien ce film manifeste peu d’empathie pour ses protagonistes si déplaisants.

Jean-Philippe Guerand







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