Film américain de Michael Sarnoski (2020), avec Nicolas Cage, Alex Wolff, Cassandra Violet, Adam Arkin, Julia Bray, Gretchen Corbett, Darius Pierce, Kevin Michael Moore… 1h31. Sortie le 27 octobre 2021.
Voici un film qui cache bien son jeu. Un SDF de l’Oregon profond se voit un jour dérober son bien le plus cher, une truie truffière devenue sa plus fidèle compagne. Un outrage qu’il ne peut pas accepter sans réagir. Alors l’homme des bois va tenter un retour à la civilisation, quitte à affronter les démons d’un passé douloureux. Le nom de Nicolas Cage en haut de l’affiche de ce film risque d’induire une méprise. Quand cet acteur tient ce genre de rôle, la vengeance de son personnage semble inéluctable et le cinéma d’action n’est jamais bien loin. Rien de tel dans le premier film de Michael Sarnoski qui s’attache en fait à la rédemption d’un homme raffiné qu’une tragédie personnelle a incité à se mettre en retrait de la société et qui va devoir sortir de sa retraite pour se mettre en paix avec lui-même et assumer ses responsabilités de père. Comme à chaque fois qu’il tourne le dos au confort illusoire que lui vaut son statut de star, Nicolas Cage est récompensé de son audace. Il trouve dans le scénario subtil de Pig matière à élargir sa palette dramatique et à jouer sur un registre minimaliste surprenant.
Ce film occupe au sein de la filmographie de son interprète principal une place de choix, équivalente à Joe (2013) de David Gordon Green dans lequel il incarnait déjà un marginal au tournant de sa vie. Il donne un aperçu de son talent, mais aussi des regrets quant à l’usage qu’il a pu en faire parfois dans des films indignes de ses capacités. Tourné dans des conditions spartiates en une vingtaine de jours, Pig revendique son caractère indépendant et sa filiation avec certaines œuvres intimistes du Nouvel Hollywood comme celles de Bob Rafelson ou plus récemment les films les plus confidentiels de Jim Jarmusch ou des frères Coen. Michael Sarnoski y dépeint une Amérique à deux vitesses où la campagne immuable contraste avec des villes de moins en moins humaines en creusant un fossé vertigineux entre urbains et ruraux qui se traduit aussi dans les urnes en polarisant une société à deux vitesses. La réussite de ce film est d’éviter de recourir à des scènes spectaculaires pour soutenir son constat, en s’appuyant sur un transfuge qui a choisi de s’éloigner de la société dite civilisée pour se resourcer en méditant sur son malheur. Tout est bon dans ce cochon !
Jean-Philippe Guerand
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